SUMER
Religion
Le monde sumérien est entièrement dominé par la religion. Une séparation entre l'Église et l'État serait proprement impensable. Le roi est le mandataire de la divinité dont il fait respecter les lois. À notre sens, le roi chef d'État est en même temps prêtre et même grand prêtre. C'est la raison pour laquelle, au cœur du palais, résidence royale, il y a un temple, maison du dieu. Les deux fonctions sont réunies dans la même personne, tout au moins dans les premiers temps. Le vase d'Uruk avec son défilé de tributaires montre, en tête du cortège, un personnage qui ne saurait être que le roi sur le point de pénétrer dans le domaine d'Inanna, pour y officier religieusement. Ce n'est que plus tard, à la suite d'une évolution et sans doute aussi d'une lutte entre les deux pouvoirs, qu'on verra apparaître, explicitement désignés, le roi et le prêtre. À plusieurs reprises, on trouve, par exemple à Tello, nommés « Entéména, prince de Lagash, Enétarzi, prêtre de Ningirsu ». Cette dualité ne dut pas s'effectuer sans douleur, car chacun tenait à ses prérogatives, et il dut y avoir des hauts et des bas. Toujours à Tello, sur les plaques « généalogiques », Ur-Nanshe est seul à officier, mais un de ses successeurs, Entéména, a dû, sur le vase d'argent, indiquer qu'« en ce jour-là, Dudu était prêtre de Ningirsu » ; le personnage faisait d'ailleurs montre d'indépendance puisqu'il avait, sans aucune référence à son souverain, voué en son nom un relief à Ningirsu. Par contre, on constatera que Hammurabi, roi de Babylone, au sommet de son code, apparaît seul devant Shamash : roi et dieu, face à face.
Le monde mésopotamien et plus spécialement sumérien est abondamment pourvu de divinités chargées de présider à la bonne marche du cosmos. Polythéisme avec une hiérarchie soigneusement établie et généralement respectée, tant que des bouleversements politiques n'entraînaient pas des modifications dans les préséances. Il ne fait pas de doute que Marduk avait bénéficié d'une remarquable promotion, en raison de la fortune qui favorisa Babylone. Pourtant la dogmatique commandait, et il était difficile d'aller contre la volonté des prêtres et des théologiens.
Au sommet de la pyramide, An, maître du ciel, qu'accompagnait Antum. Légèrement dessous, Enlil, souverain de la terre, à Nippur, suivi de sa parèdre Ninlil. La troisième personne de cette triade cosmique, Enki (Ea pour les Sémites), dans sa ville sainte d'Eridu, règne sur la masse des eaux douces, réservoir des sources. Nul doute que l'Ancien Testament n'ait gardé la marque de cette distribution tripartite du monde, quand, dans le Décalogue, on trouve l'interdiction de reproduire les choses qui sont en haut dans le ciel, ici-bas sur la terre et dans les eaux plus basses que la terre (Exode, xx, 4). Plus profond encore que ce monde inférieur, il y avait « la terre d'en bas », le monde infernal, domaine de Nergal et d'Ereshkigal. On ne sera pas étonné que les habitants des espaces désertiques aient voué une vénération spéciale aux luminaires : la lune qui guidait les caravanes et marquait les mois, Nannar (Sin) qui résidait à Ur ; Utu-Babbar, le soleil (Shamash), patron de Larsa ; Inanna (Ishtar), adorée à Uruk sous un double aspect, puisque, étoile du matin, astre du soir, elle présidait à la guerre et à l'amour. À côté de ces divinités majeures, un bataillon de puissances contrôlait la nature et ses manifestations : Ningirsu célébré à Lagash, dans son E-ninnu (maison des cinquante) ; Ninurta, voué à la guerre et à la chasse ; Dumuzi-Tammuz, dieu de la végétation disparaissant puis renaissant ; Ningishzida, protecteur de Gudéa ; Nisaba, déesse de l'écriture. Outre ces divinités plus ou moins puissantes, s'agitaient des dizaines[...]
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Écrit par
- André PARROT : membre de l'Institut, directeur du musée du Louvre
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Médias
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