SUPER-HÉROS, bande dessinée

Évolution de l'univers des super-héros

Dès la sortie d'Action Comics, de nombreux clones de Superman voient le jour, confirmant le succès de ce nouveau genre. Les personnages plus anciens, tel Doctor Occult, lorgnant vers le fantastique ou la science-fiction, s'alignent sur le mouvement, et les surhommes nouveaux se font légion. Batman est créé par Bob Kane et Bill Finger en 1939 dans Detective Comics. D'autres suivront : Crimson Avenger (Detective Comics), Sandman et Hourman (Adventure Comics), Spectre (More Fun Comics), ou des personnages légendaires comme Human Torch, Submariner ou Captain America (Marvel Comics et autres titres de l'éditeur Timely Comics).

Comme on l'a dit, la double identité des héros a permis d'exploiter un contexte réaliste proche de la vie des lecteurs. Les premières aventures de Superman montraient comment, sous son identité de Clark Kent, le héros enquêtait sur l'exploitation des mineurs par des patrons sans scrupules ou la vie d'enfants battus dans des orphelinats. L'univers d'opulence dans lequel évoluait Bruce Wayne, alter ego de Batman, était un vecteur de rêve pour le lecteur en cette période troublée, située entre le crack de 1929 et la Seconde Guerre mondiale.

Malgré la forme du feuilleton mensuel, les premiers super-héros ne connaissaient aucune évolution dans leur parcours. Tous les mois, Clark Kent, alias Superman, était snobé par Lois Lane et sauvait en parallèle le monde d'un nouveau péril, et Captain America affrontait invariablement le Red Skull ou le Ringmaster. L'enracinement dans la vie réelle était prétexte à mettre en scène des pouvoirs venant de la magie (Spectre), d'un entraînement draconien (Batman), de la science (Flash, Hourman) ou d'une origine extraterrestre (Superman).

L'engouement du public s'explique par la nouveauté. Un personnage revêtant un costume pour faire régner, incognito, la justice, et compenser sa timidité et ses faiblesses, ne pouvait que susciter la sympathie. Cependant, ils réveillèrent ou servirent d'autres sentiments aussi : la fierté, voire la supériorité, et le chauvinisme. Captain America, drapé dans la bannière étoilée, symbolise dès 1941 (année de l'attaque de Pearl Harbor par l'aviation japonaise) le patriotisme américain. Il exerce sur des nazis de papier la vengeance d'une nation en guerre. Ces sentiments finiront par s'émousser : les super-héros des années 1950 sont délaissés, les lecteurs leur préfèrent les bandes dessinées d'intrigue amoureuse ou d'horreur.

Lors du renouveau des super-héros, à fin des années 1950 et au début des années 1960, les personnages, surtout ceux du scénariste et éditeur Stan Lee au service de Marvel Comics, se rapprochent de leurs lecteurs. En prise avec le monde réel, connaissant des soucis d'argent ou de santé, ils se confrontent aux problèmes de leur époque. Spider-Man dénonce les méfaits de la drogue dans un épisode publié sans le visa de censure du Comics Code (une première pour Marvel). Tony Stark, alias Iron-Man, se demande s'il est légitime de fabriquer des armes alors que son pays s'enlise au Vietnam. Peter Parker/Spider-Man doit payer les dépenses de pharmacie de sa vieille tante ; les Fantastic Four sont expulsés de leur immeuble.

Dans les années 1980 et 1990, des sujets plus intimes sont abordés : Captain Marvel meurt d'un cancer, Tony Stark tombe dans l'alcoolisme, Northstar, membre du groupe canadien Alpha Flight, dévoile son homosexualité : les super-héros sont des gens normaux. Aujourd'hui, de nouveaux héros, dont le groupe Authority, adoptent un comportement plus interventionniste, se mêlant de politique mondiale, prenant sous leur aile des réfugiés ou renversant des tyrans. Une conscience politique se dégage, qui dépasse de loin l'instinct primitif de vengeance qui animait le [...]