SUPPORTS / SURFACES
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Une origine commune, une association tardive
Que l’on retienne la liste de Bernard Ceysson ou celle de Marie-Hélène Grinfeder, on ne pourra manquer de remarquer que l’unité de Supports/Surfaces fut d’abord géographique, ses représentants étant dans leur quasi-totalité originaires du midi de la France, où se sont déroulées aussi la plupart des grandes expositions qui les ont fait connaître. Certaines eurent ainsi lieu en plein air, à Coaraze, Montpellier, Maguelonne... Bioulès, Buraglio et Viallat avaient fréquenté ensemble l’école des Beaux-Arts de Montpellier (où enseignait le père de Dezeuze), avant de « monter », comme on disait alors, à Paris.
Mais plus encore que Montpellier, c’est Nice qui fut une plaque tournante. La ville était un foyer artistique très actif, auquel Yves Klein, Arman et Martial Raysse avaient donné ses lettres de noblesse ; Benjamin Vautier, dit Ben, y entretenait une agit-prop permanente. Viallat, qui s’y installa en 1966, y retrouva Pagès, venu de Cahors. Toni Grand, un ami d’enfance de Viallat, Saytour et Valensi y travaillèrent aussi, tout comme Louis Cane, qui fut un temps l’assistant de Martial Raysse. Et le critique niçois Jacques Lepage contribua pour beaucoup à l’élaboration des théories que l’on retrouvera dans les publications liées à Supports/Surfaces.
Louis Cane allait pourtant former ensuite avec Marc Devade un duo « parisien », proche de la revue Tel Quel, par l’intermédiaire de Marcelin Pleynet, que de nombreux différends devaient opposer à Viallat, Saytour ou Grand, restés dans le Midi. Il serait hâtif cependant de réduire, comme on le fait souvent, ces différends à une pure opposition entre parisianisme et provincialisme. Les dissensions qui amenèrent le groupe à se déliter étaient faites, en réalité, de divergences idéologiques entre les artistes (Bioulès, Cane, Devade, Dezeuze) qui fondèrent en 1971 la revue Peinture, cahiers théoriques, acquis aux thèses maoïstes, et ceux qui commençaient à prendre leurs distances avec le débat politique. Mais elles furent liées aussi à de très ordinaires rivalités personnelles, parfois attisées par la distance...
Viallat, Grand, Saytour, Dolla et Valensi reprirent chacun leur indépendance en mai-juin 1971 – c’est-à-dire quelques mois avant que les artistes restants ne déposent, en août, les statuts d’une association Supports/Surfaces, régie par la loi de 1901 : tentative de structuration tardive, que l'absence d'une figure clé comme celle de Viallat vidait de son sens.
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Écrit par
- Didier SEMIN : professeur à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris
Classification
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