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SURDÉTERMINATION, psychanalyse

Concept employé en psychanalyse pour signifier qu'une formation de l'inconscient, telle qu'un symptôme, un rêve, un lapsus, est déterminée, non par un seul facteur, mais par plusieurs, qui s'organisent en des chaînes signifiantes différentes, chacune d'elles possédant sa cohérence et requérant une interprétation particulière. Le concept de surdétermination a donc pour corrélatif essentiel celui de surinterprétation (soit une interprétation polyvalente, multiple, soit une interprétation à un autre degré de « profondeur », ou encore l'une et l'autre). L'inconscient ignore le langage aux concepts univoques. S'il est « structuré comme un langage » (Lacan), ce langage, par nature, est constitué de termes qui supportent déplacements de sens et condensations. La surdétermination est une condensation. Freud a décrit ce phénomène psychique dans son analyse du rêve. S'il n'y avait pas surdétermination mais détermination à sens unique, les « clés des songes » pourraient être vraies et l'on parviendrait à établir un dictionnaire exact des symboles et des signes oniriques, des lapsus, des actes manqués, etc. Mais c'est une entreprise qui s'avère impossible, dans la mesure notamment où « chacun des éléments du contenu manifeste du rêve est surdéterminé [...], représenté plusieurs fois dans les pensées latentes du rêve » (L'Interprétation des rêves, 1900).

Toutefois, cela ne signifie nullement qu'il faille aller à l'infini dans la psychanalyse ; on doit pouvoir atteindre un point nodal où les différentes interprétations se rejoignent et relèvent alors d'une sorte de vérification scientifique. Ce qui est vrai du rêve l'est des autres formations inconscientes. Dès 1895, dans les Études sur l'hystérie, Freud avait remarqué que le symptôme était surdéterminé. J. Lacan notera que « la surdétermination n'est strictement concevable que dans la structure du langage » (Écrits). C'est parce que son discours est surdéterminé que l'analysant utilise toutes les ruses en son pouvoir pour éviter la liberté de parole qu'implique la règle fondamentale de l'association libre.

Toute la technique de l'association libre repose sur la détermination inconsciente, mieux sur la surdétermination symbolique (et non réelle) telle que la promeut J. Lacan, quand il parle, par exemple, de la détermination que l'animal humain reçoit de l'ordre symbolique : « Il n'y a pas d'autre lieu que celui de cette détermination symbolique où puisse se situer cette surdétermination signifiante dont Freud nous apporte la notion, et qui n'a jamais pu être conçue comme une surdétermination réelle dans un esprit comme le sien [...]. Cette position de l'autonomie du symbolique est la seule qui permette de dégager de ses équivoques la théorie et la pratique de l'association libre en psychanalyse. Car c'est tout autre chose d'en rapporter le ressort à la détermination symbolique et à ses lois qu'aux présupposés scolastiques d'une inertie imaginaire qui la supportent dans l'associationnisme, philosophique ou pseudo-tel, avant de se prétendre expérimental » (Écrits).

— Pierre-Paul LACAS

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Écrit par

  • : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien

Classification

Autres références

  • NÉVROSE (histoire du concept)

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    • 4 787 mots
    ...la névrose infantile et la constitution de la névrose à l'âge adulte dépendent de deux ordres de facteurs. Ceux-ci ne sont pas indépendants les uns des autres, mais interviennent en des temps différents de l'évolution. L'organisation d'une névrose de transfert nécessite toujours unesurdétermination.