SURF
On sait relativement peu de chose des origines du surf, dans lequel Jack London voyait « le sport roi des rois naturels de la terre ». Selon Luc Lueras, c'est vraisemblablement dans les îles du Pacifique que ces jeux ont débuté sous le nom de kaha nahu. Dans la première moitié du xixe siècle, les missions protestantes qui participent à la conquête des îles Hawaii portent un regard critique sur les pratiques de surf, qu'elles tentent de limiter sinon d'interdire.
Pratiquement oublié pendant plusieurs décennies, le surf renaît à partir de 1900 grâce à deux personnages emblématiques. Le premier, George Freeth, est un métis, né de parents irlandais et hawaiiens, qui s'initie au jeu grâce à une planche traditionnelle offerte par un de ses oncles hawaiiens. Freeth crée à Waïkiki, en 1908, le premier club de surf et de natation.
C'est dans ce contexte qu'apparaît Duke Paoa Kahanamoku, considéré comme le père spirituel des surfeurs. Sa notoriété en surf et en natation l'amène à faire des démonstrations en Californie, et l'Australie l'accueille avec éclat. La carrière hollywoodienne de Duke Kahanamoku et la médiatisation du surf dans la presse californienne favorisent l'organisation de compétitions et la création de clubs.
Ce n'est qu'après 1950 que le surf se diffuse vraiment, grâce à deux innovations technologiques majeures. La première, liée à l'utilisation des fibres de verre pour la construction des planches, est attribuée au Californien Bob Simmons, qui promeut l'idée de planches courtes et légères et conduit les premières réflexions à caractère scientifique sur leur forme par rapport aux vagues ainsi que sur le rôle de la dérive. La seconde innovation date des années 1950 et correspond à l'utilisation des planches de mousse plastique, qui vont progressivement remplacer le bois léger, en particulier le balsa servant jusque-là de support à la fibre de verre. Peter Peterson, puis Hobie Alter et Dave Sweet fabriquent de nouveaux engins légers. Ces planches permettent de délaisser les trajectoires de travers et de pratiquer un surf plus acrobatique, en jouant sur les manœuvres et les postures.
La vulgarisation du surf bénéficie alors d'un important soutien de la part des médias. Hugo Verlomme considère qu'il faut attendre l'été de 1967 pour mesurer l'étonnant impact du surf sur la société américaine. Il estime que durant un dimanche ensoleillé d'août plus de 450 000 surfeurs se pressent sur les plages, qui toutes possèdent leurs clubs et leurs champions. Les stations de radios spécialisées qui diffusent des bulletins météorologiques se multiplient, les grands magazines se développent : Surfer Magazine paraît en 1960, Surfing en 1961. Se précise une surf-musique, et des films tels que Ride the Wild Surf ou Endless Summer attirent un large public. Le surf est alors présenté comme un élément de contre-culture face à l'american way of life. Une image antiutilitariste qui n'aura qu'un temps.
Les Hawaii deviennent un lieu mythique qui attire des milliers de touristes et de surfeurs. La population y est répartie sur plusieurs îles, mais c'est sur celle d'Oahu, qui abrite la capitale, Honolulu, que les principaux centres touristiques vont s'établir. Le surf se pratique tout autour de l'île, et les surfeurs choisissent les lieux en fonction de leur niveau. Au sud, les vagues de Waïkiki sont généralement d'accès facile pour les débutants, alors qu'au nord les « spots » aux noms célèbres (Pipeline, Sunset, Waimea...) sont réservés aux professionnels. À l'est (Makapu) et à l'ouest (Makaha), les vagues attirent les surfeurs confirmés. C'est donc à partir des États-Unis que le surf en tant que sport s'est constitué. Mais d'autres foyers secondaires, situés sur tous les continents, vont devenir après les années 1960 des pôles de[...]
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Écrit par
- Jean-Pierre AUGUSTIN : professeur à l'université de Bordeaux-III, C.E.S.U.R.B.-M.S.H.A.
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Médias