SURNATUREL
Chez les Grecs, le surnaturel s'oppose à la nature physique et il signifie ce qui lui est immédiatement supérieur, à savoir la nature intellectuelle, ce qui appartient à l'intelligence, à l'intelligible, eux-mêmes considérés comme divins, en raison de l'immutabilité des idées qui suppose une coupure par rapport à la mobilité et à l'incertitude de l'expérience sensible. Le mot surnaturel a reçu ensuite une acception technique dans la théologie chrétienne. Il désigne la vie même du Dieu transcendant à la nature et, par analogie, soit la communication de son intimité, soit la grâce (don de Dieu), soit les effets produits par la grâce dans la nature de l'homme, soit les effets produits par Dieu, comme signes de sa présence de grâce, dans la nature extérieure. Les théologiens précisent que le surnaturel excède toute nature créée ou créable, tandis que le préternaturel n'excède que telle nature déterminée (ainsi est dit préternaturel l'état d'Adam avant la chute). Pascal a fait entrer le terme en littérature : il le prend au sens chrétien et le définit par la « vraie charité », qui est d'un « autre ordre » que ce que suscitent le mouvement des corps et le mouvement des esprits (cf. Pensées, éd. Brunschvicg, 793). En fait, le mot surnaturel, qui de lui-même marque seulement une supériorité sur la nature (sans énoncer de quelle nature, de quelle supériorité il s'agit), est souvent pris dans un sens lâche. Lévy-Bruhl, par exemple, compare nature et surnaturel dans la mentalité primitive : il entend par surnaturel l'ensemble des représentations ou des comportements qui relèvent d'une logique de l'affectivité, par opposition aux modes de penser et d'agir qu'inspire une logique de la raison (à la fin de sa vie, Lévy-Bruhl a critiqué sa propre distinction du logique et du prélogique).
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Écrit par
- Henry DUMÉRY : professeur de philosophie à l'université de Paris-X-Nanterre
Classification
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