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SURRÉALISME Les revues surréalistes

De « La Révolution surréaliste » au « Surréalisme au service de la révolution »

Avec le Premier Manifeste du surréalisme de Breton, une période s'achève. Le groupe surréaliste a besoin d'un nouvel outil qui sera La Révolution surréaliste (12 numéros de 1924 à 1929). D'abord dirigée par Pierre Naville et Benjamin Péret, Breton demeurant à l'écart jusqu'au numéro 4, La Révolution surréaliste tourne le dos aux recherches typographiques de Dada. Le discours est empreint de gravité : « Il faut aboutir à une nouvelle déclaration des droits de l'homme » (no 1) ; « 1925 : fin de l'ère chrétienne » (le no 3 contient le message anti-occidental d'Antonin Artaud : « Adresse au pape » et « Adresse au dalai-lama »...). Ce n'est qu'au quatrième numéro que Breton prend véritablement les rênes de la revue – et donc du mouvement lui-même. La revue, désormais, généralise la pratique de l'automatisme, l'investigation du rêve et de la sexualité, l'intérêt pour la psychanalyse, les techniques menant droit au « fonctionnement réel de la pensée » (rêve éveillé, cadavre exquis...). Mais la grande nouveauté du moment est l'adoption du mot d'ordre Révolution (« La révolution d'abord et toujours ! », appel, dans le no 5), sans qu'en soit oubliée la dimension sociale.

La Révolution surréaliste durera jusqu'au Second Manifeste (1930) qui traite en grande partie des dissensions internes au mouvement. Son évolution doctrinale (ici la tentative de synthèse entre le surréalisme proprement dit et le marxisme-léninisme) entraînera la naissance d'une nouvelle revue : Le Surréalisme au service de la révolution (6 numéros de 1930 à 1933). Continuité de la recherche et cohabitation difficile du surréalisme et du communisme caractérisent la période, notamment marquée par l'« affaire Aragon ». En 1933 s'achève l'époque glorieuse des revues surréalistes et commence le temps de la dissémination marqué par l'entrisme de Breton au sein de la revue Minotaure qui paraît jusqu'en 1939 et témoigne de la rencontre Breton-Trotski. Cependant, l'histoire des revues surréalistes ne s'achève pas en 1939 et ne concerne pas que le domaine français. L'essaimage est considérable dans un grand nombre de pays : Belgique, dès 1928, avec les revues Variétés, puis Documents, puis Mauvais Temps ; Grande-Bretagne avec, entre autres, Contemporary Poetry and Prose (1936-1937) ; Argentine avec la revue Que (1928-1930), Tchécoslovaquie avec Surrealismus (1936), États-Unis avec VVV (1942-1944), à la faveur de l'exil d'André Breton ; Antilles, avec Tropiques d'Aimé Césaire...

Durant l'Occupation, en France, La Main à plume, animée par Noël Arnaud, rassemble les fidèles du surréalisme dans un esprit de résistance au nazisme. En 1947, Le Surréalisme révolutionnaire, bruxellois et parisien, ne dure guère. Il faut attendre 1956 pour que Breton reprenne la direction d'une publication, Le Surréalisme, même, très ouverte aux peintres et sensible aux grands problèmes politiques du moment (guerres coloniales, répression de Budapest...). Suivront La Brèche (1961-1965), qui marque le retour à Fourier et à l'occultisme, puis L'Archibras (1967-1969), dirigée par Jean Schuster et qui saluera les événements de Mai-68. Un ultime groupe surréaliste ne survit que trois années à André Breton dont la disparition en 1966 avait éteint les forces vives.

— Jacques JOUET

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