Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ANNABELLA SUZANNE CHARPENTIER, dite (1907-1996)

Le 14 juillet 1907, Suzanne Charpentier vient au monde dans le IXe arrondissement de Paris. Vingt-cinq ans plus tard, elle célèbre à sa façon la fête nationale et son anniversaire en devenant, sous le nom d'Annabella, choisi après lecture d'Edgar Allan Poe, Anna, la tendre et fraîche bouquetière du Quatorze Juillet de René Clair. Émue et émouvante, l'actrice trouve là le meilleur rôle d'une carrière trop rapidement tronquée.

À dix-huit ans, la chance lui avait souri. Abel Gance, séduit par sa photo, lui offre le rôle de l'emblématique Violine Fleury, éprise à jamais du lieutenant Bonaparte. Ses apparitions illuminent le maelström d'images à la gloire de Napoléon (1925-1927). Puis elle défend les vertus conjugales dans Maldone de Jean Grémillon (1927). En 1931, Annabella charme les foules dans quatre films. Gentille ballerine, elle entraîne la farandole en quête du Million (René Clair). Dans Un soir de rafle (Carmine Gallone), elle prodigue son amabilité toute simple à travers les refrains des faubourgs. Elle échappe à la poisseuse atmosphère d'Autour d'une enquête, tourné à Berlin par Robert Siodmak, en découvrant, au sortir d'un tunnel, l'étincellement de la Côte d'Azur (Paris-Méditerranée, de Joe May). Son partenaire, Jean Murat, devient son époux, et tous deux forment le « couple idéal ».

La suite de ses rôles lui réserve différents avatars en divers pays : poupée japonaise dans La Bataille (Nicolas Farkas, 1934), jeune aristocrate russe forcée d'épouser un marchand vieux et riche (Les Nuits moscovites, d'Alexis Granowsky, 1934), comtesse hongroise sensible aux violons tziganes (Caravane, d'Erik Charrell, 1934). En 1935, elle campe avec dignité une bourgeoise trompant son mari pendant la Grande Guerre (L'Équipage, d'Anatol Litvak) et, dans La Bandera (Julien Duvivier), aux confins des déserts marocains, elle assure le repos du guerrier, gracieuse et un peu maniérée. Son meilleur rôle de cette période est celui d'une humble paysanne, méprisée sur terre, qui trouve au paradis l'apaisement de ses tourments (Marie, légende hongroise, de Paul Fejos, 1932). L'année suivante, dans Gardez le sourire tourné en Autriche, le même metteur en scène proclamera la victoire de deux jeunes chômeurs sur la crise. Annabella s'y montre tour à tour éplorée, courageuse, triomphante, avec cette simplicité dont elle ne se départira jamais.

Elle devient aviatrice dans Anne-Marie de Raymond Bernard, sur un scénario de Saint-Exupéry (1936), patriote polonaise dont le cœur bat à l'unisson des prisonniers politiques (La Citadelle du silence, de Marcel L'Herbier, 1937). Hollywood la réclame. Elle était passée par l'Angleterre pour apparaître en garçon manqué dans un des premiers films en couleurs (La Baie du destin, d'Harold B. Schuster, 1936) et dans un drame de Victor Sjöstrom (Sous la robe rouge, 1937). Une fois en Amérique, après son divorce, elle vit une idylle avec le séduisant Tyrone Power. Elle s'installe aux États-Unis, jouant tour à tour dans un film de prestige (Suez, d'Allan Dwan, 1938) et dans une comédie légère (La Baronne et son valet, de Walter Lang, 1938), et ne revient à Paris que pour paraître dans Hôtel du Nord, de Marcel Carné (1938).

Ses essais sur les scènes françaises avaient été fraîchement accueillis en 1934. Elle réussit mieux aux États-Unis, en interprétant à New York Huis Clos, dirigé par John Huston, ou une reprise de Liliom. Elle tourne alors relativement peu (13, rue Madeleine d'Henry Hathaway, 1947).

À son retour en France, Annabella ne peut sortir d'un demi-oubli, et les studios espagnols ne lui sont pas favorables. Elle se retire et se consacre à des œuvres humanitaires. À sa mort, à Neuilly, le 18 septembre 1996, son nom n'évoque que difficilement son ravissant visage, sa voix détimbrée,[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification