ARRHENIUS SVANTE (1859-1927)
La carrière et l'œuvre
Après cinq années d'études à l'université d'Uppsala, Arrhenius commença ses recherches à Stockholm en 1881, sous Edlung. D'entrée, il s'applique au problème de la conductivité des électrolytes, surmonte les difficultés expérimentales de cette détermination, entre autres celles qui naissent de la polarisation des électrodes. Menés rondement, ses travaux sont présentés en 1883 dans son mémoire de thèse, rédigé en un français approximatif, sous le titre de Recherches sur la conductibilité galvanique des électrolytes, avec deux parties, l'une surtout expérimentale consacrée à la « Conductibilité des solutions aqueuses extrêmement diluées déterminée au moyen du dépolarisateur », l'autre présentant une « Théorie chimique des électrolytes ». Le jury ne comprit point la portée de ces travaux, et ne décerna qu'une mention de quatrième classe (Non sine laude approbatur), qui légalement excluait le jeune docteur du cours académique. Mais l'offre par Ostwald d'une chaire à Riga détermina les Suédois à accorder à Arrhenius un poste de docent à Uppsala. En 1886, il quitte son pays pour un long voyage d'étude qui le mènera dans les laboratoires d'Ostwald à Leipzig, de Kohlrausch à Würzburg, de Boltzmann à Graz et de Van't Hoff à Amsterdam. Rentré en Suède, il enseigne à Stockholm, devient recteur de l'École technique supérieure, reçoit en 1903 le prix Nobel, puis, à partir de 1905 jusqu'à sa mort, présidera aux destinées de l'Institut Nobel.
Dans le mémoire de 1883, Arrhenius avait présenté les résultats de mesures qui portaient sur 45 électrolytes, dont 5 acides, et avait formulé sa théorie en 56 propositions, dont beaucoup ont conservé leur valeur. Il avait été conduit à penser que toutes les molécules d'électrolyte ne participent pas au transport de l'électricité dans les solutions. Son « hypothèse » fondamentale est que « tous les sels proprement dits (outre les sels, il comprenait, sous ce terme, les acides et les bases), dans les solutions, sont constitués de complexes moléculaires qui se détruisent en partie à la dilution ». Il note que les rapports des résistances de solutions également diluées varient selon qu'il s'agit de ce que nous désignons par électrolytes forts (par exemple, l'acide chlorhydrique) et électrolytes faibles (par exemple, l'ammoniaque, l'acide borique, les sels de métaux lourds). Arrhenius donne une image dynamique de la dissociation électrolytique : « La solution aqueuse d'un hydrate quelconque se com-pose, hors l'eau, de deux parties, l'une active, l'autre inactive. Ces trois parties constituantes, l'eau, l'hydrate actif et l'hydrate inactif, forment un équilibre chimique tel qu'à une dilution la partie active augmente et la partie inactive diminue. » Il établit la relation entre la « force » des acides et des bases et leur coefficient d'activité (notre degré d'ionisation) et note justement que « la chaleur de neutralisation dégagée par la transformation d'une base et d'un acide parfaitement actifs en eau et sel non compliqué n'est que la chaleur d'activité de l'eau » ; ainsi, il établit la constance de la chaleur de neutralisation des fonctions acides fortes.
Ce ne sera qu'en 1887 que la théorie de la dissociation électrolytique d'Arrhenius prendra sa forme achevée, en procurant une explication satisfaisante aux écarts systématisés par Raoult et Van't Hoff entre solutions salines et solutions non électrolytes (les liqueurs sucrées, par exemple). Arrhenius montre que chacun des ions présents en solution se comporte comme une individualité moléculaire, capable d'exercer en liqueur diluée les actions des molécules non dissociées sur les propriétés osmotiques, tonométriques,[...]
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Écrit par
- Jacques GUILLERME : chargé de recherche au C.N.R.S.
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