SYNDICATS AGRICOLES
Internationalisation des enjeux
En même temps que l'Europe se débat, dans les années 1980-1990, sur la façon de résoudre sa crise des surplus agricoles, la société prend conscience des effets négatifs du modèle de l'agriculture intensive pour le territoire : pollution des intrants (engrais, pesticides...) et fragilisation des espaces agricoles aux aléas naturels (inondations...) d'un côté ; enfrichement, incendies et fermeture des paysages de l'autre. À la fin des années 1990, une succession de crises sanitaires mettent en accusation certaines pratiques d'élevage dites « modernes ». Parallèlement, les médias sont devenus plus critiques à l'égard des « lobbies agricoles » et le premier d'entre eux : « la toute-puissante F.N.S.E.A. » accusée d'avoir « parrainé toutes les folies de l'agriculture intensive ». La grande centrale syndicale paye alors le monopole qu'elle a exercé dans la co-définition de la politique agricole, son attitude politique très partisane et son aversion à l'encontre des mouvements écologistes.
En revanche, la Confédération paysanne bénéficie d'un courant de sympathie dans l'opinion qui dépasse l'électorat de gauche. Depuis longtemps, elle dénonce le « productivisme agricole » et met les attentes de la société au cœur de son projet pour l'agriculture. Aujourd'hui, les positions affichées des différentes organisations syndicales se sont rapprochées en matière de régularisation des marchés, de maîtrise de la production et d'une meilleure prise en compte des attentes de la société, même si les projets concrets restent encore divergents, notamment à propos des organismes génétiquement modifiés (O.G.M.). Cependant, le devenir de l'agriculture se joue désormais principalement aux niveaux de la P.A.C. et de l'O.M.C. où des choix cruciaux sont en débat. Or le poids politique du syndicalisme agricole s'est considérablement affaibli et, parallèlement, de nouvelles forces ont émergé – mouvements écologistes et associations de consommateurs – qui entendent peser sur cette politique agricole. La forte hausse des prix des denrées alimentaires dans le monde, en 2007 et 2008, inquiète grandement les populations, en particulier dans les pays en développement. Tous les syndicats agricoles attribuent cette hausse à la dérégulation des marchés agricoles des quinze années précédentes.
Au-delà de ces singularités nationales, on rencontre un certain nombre de traits communs au syndicalisme agricole à travers l'Europe. Au départ, on trouve des sociétés d'agriculture, ou des regroupements qui tiennent le même rôle, dont les membres, imprégnés de l'esprit des lumières et de l'académisme du temps, entendent promouvoir le progrès. Elles sont l'œuvre des mêmes couches sociales, propriétaires fonciers et bourgeoisie rurale, y compris les exploitants agricoles aisés, que le pouvoir politique peut encourager. On rencontre, pour partie, les mêmes influences idéologiques, en particulier celle du catholicisme social, notamment en Belgique, Allemagne, Italie, Espagne, Pays-Bas, sachant que, dans ce dernier pays, s'est exercé aussi l'influence de protestantisme social. Les courants socialistes ont pu influencer le syndicalisme des exploitants, un peu plus tardivement et modestement – comme en France – au Danemark et dans l'Europe du Sud : Italie, Espagne, Portugal, Grèce. Ces différentes influences idéologiques peuvent recouvrir des clivages sociaux de même nature, entre petits et gros agriculteurs, entre tenanciers et propriétaires, entre ouvriers agricoles et exploitants-employeurs. Dans tous les pays, le syndicalisme des exploitants agricoles a développé les mêmes services et les mêmes initiatives coopératives et mutualistes. C'est la raison principale d'un taux de syndicalisation généralement[...]
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Écrit par
- Jean VERCHERAND : ingénieur agronome, docteur en histoire contemporaine, ingénieur de la recherche à l'Institut national de la recherche agronomique
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