SYSTÈME, épistémologie
La théorie des systèmes
La théorie des systèmes s'efforce d'établir le cadre le plus général à l'intérieur duquel on peut étudier le comportement d'une entité complexe analysable, c'est-à-dire son évolution au cours du temps. Les objets dont s'occupe directement cette théorie sont des entités abstraites, les systèmes. Pour que la théorie puisse être effectivement utilisée, il faut qu'une certaine correspondance soit établie entre un système et le type d'objet étudié (corps matériel, ensemble de corps liés d'une manière plus ou moins rigide, être vivant, société d'êtres vivants, etc.). Deux problèmes se posent donc au niveau épistémologique : celui de la caractérisation interne de la théorie et celui des conditions de son utilisation.
La théorie proprement dite
Un système est un objet complexe, formé de composants distincts reliés entre eux par un certain nombre de relations. Les composants sont considérés comme des sous-systèmes, ce qui signifie qu'ils entrent dans la même catégorie d'entités que les ensembles auxquels ils appartiennent. Un sous-système peut être décomposé à son tour en sous-systèmes d'ordre inférieur ou être traité (au moins provisoirement) comme un système indécomposable, c'est-à-dire comme un système réduit à un seul élément. L'idée essentielle est que le système possède un degré de complexité plus grand que ses parties, autrement dit qu'il possède des propriétés irréductibles à celles de ses composants. Cette irréductibilité doit être attribuée à la présence des relations qui unissent les composants. On pourra donc parler à ce propos de relations définissantes. Les propriétés globales les plus intéressantes d'un système sont celles qui ont trait à son comportement évolutif. On suppose que l'évolution d'un système est conditionnée à la fois par les modifications internes qui peuvent affecter les composants ou les relations définissantes et par les interactions qui peuvent s'établir entre le système et son environnement. Au cours de son évolution, un système peut conserver une certaine stabilité ; il peut aussi se transformer soit dans le sens de la désagrégation, soit dans le sens d'une plus haute intégration.
La stabilité est une propriété d'invariance : un système est stable (ou relativement stable) s'il conserve ses propriétés (ou une partie de ses propriétés) malgré les modifications internes qu'il peut subir et malgré les interactions avec l'environnement ; ainsi, on pourra parler de la stabilité d'une configuration spatiale pour désigner le maintien des relations géométriques entre les composants. La notion de stabilité n'est évidemment pas incompatible avec celle de variation. Ainsi, un système peut osciller autour d'une position d'équilibre ; pour autant qu'il ne s'écarte pas trop de cette position, on admettra qu'il est stable. La non-stabilité peut prendre deux formes : celle d'une évolution vers la désagrégation ou celle d'une évolution vers des configurations plus fortes. Dans les deux cas, on a affaire à une véritable transformation du système. On pourrait parler de modification qualitative, par opposition aux modifications quantitatives, qui ne modifient pas la structure du système (par exemple, les oscillations autour d'une situation d'équilibre). La désagrégation conduit à la rupture, partielle ou totale, du système : rupture partielle s'il y a un affaiblissement des liaisons entre composants (par transformation des relations définissantes), rupture totale s'il y a destruction de ces liaisons. L'autre type d'évolution est ce qu'on appelle l'auto-organisation : c'est un renforcement des relations définissantes (transformation des relations existantes, éventuellement apport de nouvelles relations) qui dote le système de propriétés nouvelles. Ainsi, un système peut acquérir de l'information par[...]
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Écrit par
- Jean LADRIÈRE : professeur émérite à l'université catholique de Louvain (Belgique)
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