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TAHA HUSSEIN (1889-1973)

Taha Hussein est sans doute l'un des plus grands écrivains arabes contemporains. Créateur d'une langue et d'idées nouvelles, celui qu'on appelait le « doyen des lettres arabes » fut l'une des figures les plus originales et les plus puissantes de la pensée et de la littérature arabo-islamique. Lu et commenté dans tout le monde arabe, étudié dans les lycées et les universités, admiré partout où l'on parle l'arabe, Taha Hussein a été traduit dans une douzaine de langues et, son nom ayant franchi la Méditerranée, les universités d'Oxford, de Madrid, de Rome, de Montpellier, d'autres encore, lui ont décerné le titre de docteur honoris causa. Les honneurs dont il a été l'objet et le respect qu'on lui témoigne s'expliquent par l'exemplarité de sa vie et par l'influence décisive que son œuvre a exercée sur plusieurs générations de lecteurs.

Le combat d'un intellectuel

Né à Maghāgha, bourgade de la Moyenne- Égypte, le 14 novembre 1889, et décédé au Caire en novembre 1973, Taha Hussein, issu d'un milieu modeste, perd la vue à l'âge de trois ans. La cécité isole l'enfant, mais approfondit sa sensibilité : désormais il connaîtra les êtres et les choses par l'ouïe et le toucher. Sa famille et la maison le protègent ; la petite ville et la campagne avoisinante forment son univers. Les pauvres, auxquels il consacrera son roman Les Damnés de la terre (Al-mu‘azzabūn fi-l ardh, 1949), le fellah qu'il décrira dans L'Appel du Karawan (Du‘ā' al-Karawān, 1934), ces humbles qui voient croître dans leur champ l'« arbre de la misère », titre d'un autre de ses romans, éveillent en lui amour et pitié. Le cœur du garçon est grand, et dans le jeune infirme se développent une intelligence précoce et une tenace volonté : il ne sera pas celui qu'on destine à réciter le Coran le soir dans les demeures provinciales. À neuf ans, il connaît par cœur le livre saint ; à treize ans, il obtient d'accompagner son frère aîné au Caire où il suivra les cours de la célèbre université théologique d'al-Azhar. Déçu par le conservatisme sclérosé de cet enseignement, il s'insurge contre les maîtres d'un temps révolu. La création de l'université du Caire en 1908 permet à Taha Hussein, qui a alors dix-neuf ans, l'accès à des disciplines pour lui nouvelles : histoire, linguistique, philosophie, littérature. La civilisation occidentale lui est révélée. Il est résolu à fournir l'effort nécessaire afin d'avoir une bourse pour la France. Il y parvient et s'embarque en 1914. En moins de trois ans, il apprend le français, le grec et le latin, passe sa licence à Montpellier où il rencontre une jeune Française qu'il épousera à Paris en 1917. Après un diplôme d'études supérieures sur un sujet d'histoire romaine, il soutient en Sorbonne une thèse sur la philosophie sociale d'Ibn Khaldūn. Rentré en Égypte, il est nommé professeur à l'université du Caire : à la jeunesse, il explique ce que sont la critique moderne, les tragiques grecs, les poètes latins, la littérature française. En 1931, il est élu doyen de la faculté des lettres et le restera de nombreuses années. En 1942, il fonde à Alexandrie, d'où l'on entend les canons de la bataille d'El-Alamein, la deuxième université égyptienne ; il en sera le premier recteur. En 1950, Taha Hussein est ministre de l'Éducation nationale ; il crée l'université de ‘Ayn Shams et fait voter par les Chambres la gratuité de l'enseignement primaire. Il reprend ensuite son œuvre d'écrivain et de journaliste. Il devient président de l'Académie de la langue arabe. Le petit aveugle menacé, à la fin du xixe siècle, de végéter dans sa lointaine province, a tenu les promesses qu'il s'était[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres (Sorbonne), agrégé de l'Université, interprète à l'O.N.U., Genève

Classification

Autres références

  • ARABE (MONDE) - Littérature

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    • 29 248 mots
    • 2 médias
    De son côté,Ṭaha Ḥusayn, sans partager tout à fait les développements orientalistes sur le génie littéraire d'un Ibn al-Muqaffa‘, reprend la thèse de Marçais sur les impératifs de la genèse des genres et la développe dans le but de rassurer certains esprits suspicieux et d'atténuer le débat, passionné...
  • LE LIVRE DES JOURS, Taha Hussein - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 860 mots

    Lorsqu'il publie la première partie de ses Mémoires, en 1927, Taha Hussein (1889-1973) traverse une passe difficile dans une existence très tôt marquée par l'adversité : à trois ans, une ophtalmie mal soignée l'a privé à jamais de la lumière dont il garde un pâle souvenir, évoqué dans l'admirable...