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TALMUD

Pour le judaïsme, l'authentique interprétation de la Bible hébraïque a été déposée dans la Tora orale, qui constitue le complément et l'achèvement incontestable de la Tora écrite. Véritable « mystère » divin, elle n'a été confiée par le Verbe qu'à la seule communauté d'Israël, puis transmise par la bouche, de maître à élève, de génération en génération. Mais, dans une saisissante vision marquée de ce caractère paradoxal si courant dans la pensée talmudique, le Talmud montre le plus grand de tous les prophètes, Moïse, assistant à un cours de l'illustre Rabbi Aqiba et étonné de voir celui-ci énoncer, sous son nom, des commentaires que lui-même, le Maître par excellence, ne connaissait pas. On ne pouvait mieux illustrer l'idée que le Talmud est, en même temps qu'une tradition, l'incessante relecture et la constante réactualisation de l'insondable Tora de Moïse par des docteurs qualifiés. « Tout ce qu'un disciple fervent est destiné à apporter de neuf, lit-on encore dans le Talmud, a été déjà dit à Moïse sur le mont Sinaï. »

La loi orale

À côté de la Loi écrite, les pharisiens postulaient l'existence d'une Loi orale, que les sadducéens se sont toujours obstinément refusés à admettre, tout comme les karaïtes au Moyen Âge. On en faisait remonter l'origine à Moïse, qui l'aurait reçue pendant ses différentes retraites sur le mont Sinaï. Elle aurait consisté en interprétations détaillées des préceptes souvent laconiques du Pentateuque, interprétations qui en auraient fixé avec précision les modalités d'application. De Moïse à la destruction du Temple, la chaîne de la transmission était établie de la manière suivante : Moïse, Josué, les Anciens, les Prophètes, la Grande Synagogue, qui comprenait les trois derniers d'entre eux : Aggée, Zacharie, Malachie – Simon le Juste, qu'on identifie soit avec les grands prêtres Simon I (env. 300 av. J.-C.) ou Simon II (env. 200), soit avec l'ethnarque Simon l'Hasmonéen (142 av. J.-C.-135 apr. J.-C.) –, Antigone de Sokho, une suite de duumvirats jusqu'à Hillel et Shammay sous le règne d'Hérode I, puis Gamliel l'Ancien et Yohanan ben Zakkay. Cette chaîne pose de multiples problèmes toujours débattus, les deux plus importants portant sur la nature même de cette Grande Synagogue (fut-elle réelle ou fictive ? était-ce une institution fixe ou une assemblée réunie quand certaines graves circonstances l'exigeaient ?), ainsi que sur l'autorité véritable dont pouvaient être investis ces duumvirs pharisiens dans une société que d'autres sources (Flavius Josèphe et le Nouveau Testament) montrent essentiellement dirigée par de grands prêtres aux pouvoirs les plus amples.

Quoi qu'il en soit, après la destruction du Temple en 70 après J.-C., toutes les autres sectes s'étant éteintes, les rabbins, successeurs des pharisiens, prennent en main les destinées d'une nation meurtrie par la catastrophe. Ils créent un judaïsme sans Temple, mettent en ordre des traditions transmises depuis des temps immémoriaux, et, d'abord en Judée puis en Galilée, ouvrent de nombreuses académies et se livrent à un travail d'interprétation de l'Écriture suivant des canons herméneutiques qui se précisent et s'affinent et dont les démarches seront consignées dans le MidrashHalakha [Midraš Halakha] (commentaires des textes législatifs du Pentateuque). L'existence d'un patriarcat particulièrement soucieux d'unifier le judaïsme ne réussit pas toujours à brider l'individualisme des docteurs et de leurs écoles. Interprétations et décisions, discussions et confrontations prolifèrent.

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Écrit par

  • : docteur en théologie, docteur en histoire de la philosophie, docteur d'État ès lettres, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)

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