TANG YIN[T'ANG YIN](1470-1523) ET QIU YING[K'IEOU YING](1510 env.-1551)
Parmi les nombreux peintres de Suzhou au xvie siècle, Tang Yin et Qiu Ying, par leur personnalité, leur mode de vie et leur production artistique, se situent quelque peu en marge. À côté des influences de l'école de Wu et des maîtres Yuan, ils acceptent aussi certains critères du courant académique et développent, à partir de ces sources éclectiques, une manière personnelle.
Tang Yin : une carrière brisée
Tang Yin naît à Suzhou dans un milieu modeste de commerçants. En 1485, il est brillamment reçu aux examens de la préfecture, puis en 1497 à ceux de la province. Considéré très tôt comme un jeune génie, il est protégé et admiré par des hommes comme Shen Zhou, Wu Kuan et Wen Lin, le père de Wen Zhengming dont il est l'ami. Son tempérament, ses dons font de lui un extroverti.
À vingt-huit ans, Tang Yin part pour la capitale passer l'examen d'État qui doit lui ouvrir les portes de la haute bureaucratie gouvernementale. Arrivé à Pékin, il mène grand train en compagnie du fils d'un homme riche. Peu doué, ce dernier va soudoyer le serviteur de l'examinateur en chef, qui lui communique les sujets. L'affaire est ébruitée et les deux jeunes gens emprisonnés. Tang Yin, qui n'a pu établir son innocence, est privé de tous ses titres académiques.
Très humilié, il rentre à Suzhou. Pour lui, tout un univers s'écroule. Rejeté par sa femme, méprisé par beaucoup d'anciennes connaissances, il devient cynique, se plaît à choquer les gens et se met à boire. La vie de lettré lui est interdite. Sa situation modeste le contraint à mener une existence bohème ; il vend ses peintures quand il a besoin d'argent, allant oublier l'amertume de sa dégradation dans les auberges et chez les courtisanes, pour le lendemain transcender par la méditation chan ses lamentables débauches. Ce parangon de vertu qu'est Wen Zhengming lui conservera néanmoins toute sa vie son amitié.
En 1501, pour secouer sa dépression, Tang Yin part visiter les paysages du Zhejiang, du Fujian, du Hunan et du Sichuan. Il voyage à peu près un an, jusqu'à l'épuisement de ses forces.
À la fin de sa vie, cette nature sensitive trouvera quelque consolation dans le bouddhisme chan.
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Écrit par
- Michèle PIRAZZOLI-t'SERSTEVENS : directrice d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)
Classification
Média