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TAPIS MODERNES ET CONTEMPORAINS

Un nouvel engouement

L'art du tapis est enfin sorti de la désaffection qui le frappa durant les années 1960. Plusieurs facteurs expliquent ce regain d'intérêt. De nombreux artistes, architectes, designers ont montré qu'un tapis est une création à part entière et non un simple objet d'usage destiné à recouvrir le sol. Si la tapisserie rencontre certaines difficultés – où la placer quand le mur se module ou devient moins présent dans une architecture de verre ? – la primauté au sol qui redevient une donnée fondamentale de la création plastique grâce aux environnements, aux installations ouvre de nouvelles possibilités au tapis.

La politique de commande du Mobilier national, devenue moins hésitante depuis la fin des années 1970, a montré quel degré d'excellence pouvaient atteindre les tapis tissés à Beauvais ou Lodève : d'après les cartons d'artistes réputés comme Pierrette Bloch, Geneviève Asse, François Bouillon, Buraglio, Jaume Plensa, Sautour-Gaillard, Zao-Wou-Ki. Les manufactures marchoises ne sont pas en reste, avec des tapis tissés sur des cartons de Sarkis, Olivier Mosset, John Armleder ou Sylvain Dubuisson. Ce rôle de promotion demeure essentiel ; il demanderait néanmoins à être élargi grâce aux commandes privées.

Dans une métaphore opportune, certains ont comparé les techniques traditionnelles du tapis à la haute couture et le tapis tuft au prêt-à-porter. Comme ce dernier, le tapis contemporain tufté fait preuve d'une éclatante vitalité, toutes les tendances protéiformes de l'art d'aujourd'hui s'y confrontent, du minimalisme d'Olivier Gagnère au néo-baroque de Garouste et Bonetti.

Les problèmes du tapis contemporain concernent moins la création que les coûts de production. À titre indicatif, le prix de tissage au mètre carré d'un tapis de savonnerie est, en 1999, d'environ 5 700 euros et celui d'un tapis tufté de 1 000 euros. Il semble ne plus y avoir de solution intermédiaire entre les techniques traditionnelles réservées à la commande d'État ou au mécénat et le tapis tuft qui a su intéresser le public et les artistes. Le tapis ne reflète plus guère la conception de haut luxe défendue par les grands décorateurs des années 1920 à 1950. Les réalisations actuelles sont multiformes, complexes et contradictoires. Le sol est perçu tantôt comme une source de questionnement sur nos racines, notre identité première dans une volonté de dépouillement, tantôt comme un moyen de dépaysement imaginaire pour oublier la banalité voire l'hostilité du monde extérieur. Le besoin du cocon, devenu si puissant, explique sans doute ce dynamisme créateur, montrant l'adéquation de la fibre et de la laine aux sensibilités les plus contrastées de notre temps.

— Michèle HENG

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Écrit par

  • : adjointe à la Miission ameublement du Mobilier national, chargée du fonds textile d'Aubusson du XXème siècle au Mobilier national
  • : maître de conférences en histoire de l'art contemporain à l'université de Toulouse-II

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