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TECHNOCRATIE

On entend par technocratie la prise en main et la direction de la société par des techniciens mus par les impératifs technico-économiques. Initialement, le dessein en fut présenté, dans les années 1931-1933, au public américain par le Mouvement technocratique. Ce mouvement naquit à New York et se constitua comme groupe d'études autour de Howard Scott, personnalité charismatique qui se prévalait d'une expérience technique universelle. S'inspirant de Thorstein Veblen, Scott affirme que la révolution technologique va rendre caducs les vieux concepts économiques. L'acception de ceux-ci était en effet établie en fonction d'une rareté des biens économiques que l'on avait instituée comme principe de toute pensée économique. Il annonce l'effondrement imminent du « système de marché » (price system) et son remplacement par une bienfaisante technocratie. Hantée par la crise économique qu'elle vient de connaître, l'Amérique accueille favorablement cette théorie optimiste et voit naître d'innombrables organisations technocratiques : le mouvement se développe à l'automne 1932, mais cesse quelques mois plus tard.

Pour nombre de sociologues contemporains, les technocrates sont des techniciens qui, en raison de leurs compétences techniques, peuvent imposer leur pouvoir aussi bien aux hommes politiques traditionnels qu'aux propriétaires de firmes. Gouvernant ou étant censés gouverner par la technique, ils se voient reprocher par certains d'adopter une explication mécaniste de la société humaine, par d'autres de n'offrir que des solutions d'« organisation » aux problèmes politiques. D'aucuns encore considèrent les technocrates comme des fonctionnaires manquant de réalisme et insuffisamment responsables, et d'autres les disent les serviteurs du pouvoir établi. De là l'usage péjoratif du qualificatif de technocrate. Il demeure que, dans une société industrielle, les technocrates — qu'on les appelle managers, directeurs techniques, ou d'un autre nom — ne sont pas de purs techniciens ; il leur incombe certes d'exercer leurs compétences techniques dans un ordre de pratiques limité, mais aussi, qu'ils en soient eux-mêmes conscients ou non, d'opérer et d'assumer par ce biais même un ensemble de choix politiques.

—  ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS

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