TECHNOLOGIE CULTURELLE
Techniques de fabrication
Les histoires générales classent souvent les techniques d'après leurs fonctions, traitant de la métallurgie, de la céramique, de la vannerie, etc. Si cette méthode descriptive permet d'aborder avec pertinence les techniques d'un groupe donné, elle présente par contre de graves inconvénients dès lors qu'il s'agit d'analyse générale, car elle risque de masquer la cohérence globale des ensembles. En effet, les caractères intrinsèques d'un matériau conditionnent son traitement et, de ce fait, les ressemblances ou les différences entre techniques. Ainsi classe-t-on les matières en solides stables, solides fibreux, solides semi-plastiques, solides plastiques, solides souples, et fluides.
Les solides stables sont ceux dont les propriétés physiques ne changent pas en cours de traitement. Leur modelage doit se faire soit par l'éclatement brut de la matière, soit par son usure. Les plus vieux témoins qui restent de l'activité humaine sont le résultat d'un traitement de solides stables : ce sont les silex taillés de la préhistoire. Il faut souligner que la première amélioration technique dans l'histoire de l'homme fut celle qui porta les fabricants de silex à préparer un plan de frappe, de telle sorte que l'éclat corresponde à une forme abstraite, préconçue dans l'esprit, et ne soit pas simplement le résultat de coups frappés au hasard.
Les solides fibreux se travaillent comme les solides stables en tenant compte toutefois du sens des fibres dans le maniement des outils. Étant donné que les végétaux sont les premiers matériaux utilisés par l'homme, il n'est pas étonnant de trouver couteaux, échoppes, ciseaux, perçoirs, herminettes et haches parmi les plus anciens outils, que la culture fasse appel au bois ou au bambou, à la corne ou à l'ivoire.
Les solides semi-plastiques, essentiellement les verres et les métaux, peuvent soit subir une déformation permanente au cours de leur traitement, soit être travaillés comme des solides stables. Assez curieusement, la fabrication du verre a été restreinte jusqu'à nos jours à l'aire méditerranéenne et proche-orientale. Les Chinois en connaissaient bien le principe, puisque maintes formes céramiques de la Chine traditionnelle sont recouvertes d'engobes vitrifiés, mais ils ne cherchèrent apparemment jamais à fabriquer des objets entièrement en verre. Il est très difficile, bien entendu, de formuler une explication pour un phénomène en quelque sorte « négatif », mais on peut remarquer que, d'une part, les Chinois pouvaient satisfaire sans le verre tous leurs besoins en contenants, puisqu'ils possédaient depuis la plus haute antiquité des techniques de poterie extrêmement raffinées, et que, d'autre part, étant passés maîtres dans les arts du papier et de la soie, la recherche d'une matière translucide ne pouvait les intéresser.
En ce qui concerne la métallurgie, on retrouve dans toutes les cultures une chaîne opératoire similaire pour tous les métaux : extraction, fonte (pour débarrasser le métal d'impuretés ou en altérer la teneur) et travail (moulage, martelage à chaud, ciselure à froid). La métallurgie du fer fournit un bon exemple des préoccupations et des problèmes de la technologie culturelle. En effet, une série logique construite d'après les critères de température de la fonte mène à poser en premier lieu les fers doux, obtenus surtout à partir de minerais oxydés. Un processus de réduction et l'élévation de la température de fonte donnent les aciers carburés. Les températures les plus élevées, au-delà de 1 500 0C, permettent de réduire le minerai de fer à l'état liquide, et ainsi de couler une fonte de fer. Très schématiquement, cette série logique présente une certaine analogie avec une série historique. En effet, sauf en Chine,[...]
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Écrit par
- Robert CRESSWELL : directeur de recherche au C.N.R.S.
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