TELL ES-SAKAN, site archéologique
Situé au sud-ouest de la Palestine, à 5 kilomètres au sud-ouest de la ville de Gaza, Tell es-Sakan est une butte artificielle de 5 à 8 hectares, qui domine la plaine littorale d'une dizaine de mètres. Le site a été découvert à l'automne de 1998, à l'occasion des travaux de construction d'un complexe d'habitations. Le creusement de profondes fondations avec des engins mécaniques a révélé des vestiges de constructions en brique crue et un abondant mobilier archéologique, qui indique que le site a été occupé exclusivement au Bronze ancien, de 3300 environ à 2250 avant notre ère. C'est le seul établissement de cette époque connu dans la bande de Gaza. À en juger par ses dimensions, il en était probablement alors l'agglomération principale. Sa situation à la frontière de Canaan, près d'un gué constituant un passage obligé sur la route qui mène en Égypte, en fait un site exceptionnel pour connaître les relations entre la Palestine et l'Égypte aux IVe et IIIe millénaires, de l'époque prédynastique à l'Ancien Empire.
Pour sauver le site de Tell es-Sakan, menacé par la poursuite des travaux de construction, une mission archéologique franco-palestinienne fut organisée dès l'automne de 1999, grâce à l'appui des autorités palestiniennes et l'aide du Consulat général de France à Jérusalem. Dirigée conjointement par Pierre de Miroschedji (C.N.R.S., U.M.R. 7041, Archéologie et sciences de l'Antiquité) et par Moain Sadeq (directeur du service des Antiquités de Gaza), elle conduisit quelques sondages sur le site. L'année suivante eut lieu une première campagne de fouilles à grande échelle, avec le soutien financier du programme des Nations unies pour le Développement, du ministère des Affaires étrangères français et du Consulat général de France à Jérusalem.
Les fouilles concernaient trois chantiers adjacents (A, B et C) et couvraient une superficie totale de plus 1 400 mètres carrés. Représentée par des dépôts archéologiques d'une épaisseur de 9 mètres, la séquence d'occupation du site comprend deux phases principales, culturellement distinctes. Pendant la première phase d'occupation, Tell es-Sakan était un site égyptien : les niveaux 9 à 6, d'une épaisseur totale de 2 mètres à 2,50 mètres, sont en effet caractérisés par une culture matérielle presque exclusivement égyptienne, correspondant à l'époque prédynastique récente (fin du IVe millénaire) en Égypte, et en Palestine à la fin du Bronze ancien I. Ces niveaux ont été atteints dans les fouilles du chantier A. Pendant la seconde phase d'occupation, Tell es-Sakan devient un site cananéen : les niveaux 5 à 1, qui représentent ensemble plus de 6 mètres d'épaisseur, relèvent en effet de la civilisation locale cananéenne du Bronze ancien III (vers 2600-2300). Ils ont été explorés partiellement au chantier C (pour le niveau 4) et au chantier B (pour le niveau 1).
L'établissement égyptien
Au cours des trente dernières années, plus d'une douzaine de sites renfermant du mobilier archéologique égyptien daté de la fin du IVe millénaire ont été découverts au sud-ouest de la Palestine. La mise au jour d'un mobilier semblable sur un site contemporain de la région de Gaza n'était donc pas inattendue. Pourtant, plusieurs éléments ont fait de cette découverte une surprise : le mobilier archéologique des niveaux 9 à 6 est en effet égyptien dans sa quasi-totalité ; le site est clairement une fondation égyptienne ; il est de grande superficie ; et surtout, il s'agit d'un établissement fortifié.
Trois murailles successives ont été repérées dans les fouilles. La plus ancienne (muraille A1), épaisse d'environ 1,50 mètre et conservée sur une hauteur équivalente, comportait un ouvrage extérieur, bastion ou tour. Son[...]
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Écrit par
- Pierre de MIROSCHEDJI : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur du Centre de recherche français de Jérusalem
- Moain SADEQ : directeur du service des Antiquités de Gaza
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Médias