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TELUGU ou TELOUGOU

Le telugu (ou télougou), la plus importante des langues dravidiennes par le nombre de ses locuteurs, occupe dans l' Union indienne la deuxième place après le hindi. Langue officielle de l'État d' Āndhra Pradesh depuis 1965, la norme parlée moderne est celle des districts côtiers, plus prestigieux. Une production littéraire continue depuis le xie siècle illustre l'aphorisme local : le telugu est la meilleure des langues vernaculaires – à cause de sa musicalité. Plus que pour d'autres s'impose le problème de l'originalité de sa littérature : la langue et les techniques, les idées et les types sont largement inspirés du sanskrit ; de plus, on souligne de nombreux parallèles avec la littérature kannaḍa (ou kannara).

Pourtant, et dès le xiie siècle, la voie indigène, ou dēśi, démontre que l'originalité telugu ne se borne pas à la virtuosité ; ainsi du choix de certains mètres comme le populaire dvipāda, de genres comme les śataka (ou centuries) udāharaṇa, plus sophistiqués, ou surtout les formes dramatiques du yakṣagāṇa et les ballades lyriques et narratives d'où est sorti le populaire burrakatha. Enfin, depuis le réveil social et littéraire de la fin du xixe siècle, la critique telugu fait aux œuvres contemporaines une place exceptionnellement importante.

Des siècles d'adaptation

La littérature telugu débute au xie siècle avec Nannaya (env. 1030). L'épigraphie livre jusqu'au vie siècle des vocables isolés puis, aux ixe et xe siècles, des fragments en prose. L'inscription de Turimella (viie s.) cependant laisse entrevoir un style littéraire telugu, mais le prākrit puis le sanskrit ont gardé longtemps le monopole de l'expression écrite. Nannaya, patronné par le roi Chalukya Rājarāja Narendra (1022-1063), avec une version telugu de deux chants et demi du Mahābhārata sanskrit, inaugure, non sans originalité ni éclairs de poésie, une longue série d'œuvres épiques et purāṇiques imitées ou adaptées du sanskrit. Vers 1250, Tiḳkana en continue la traduction, avec plus de souplesse dans le maniement de la langue où le telugu a la meilleure part et plus de caractère et de vivacité dans les épisodes. Au pionnier Nannaya est prêté un traité grammatical en sanskrit, l'Āndhra śabda cintāmaṇi (en fait, il date environ du xviie siècle) ; Tiḳkana sert d'idéal à la première grammaire telugu par Kētana (xiiie s.), l'Āndhra bhāṣā bhūṣaṇamu. L'adaptation du Mahābhārata fut complétée au xive siècle par Errāpragada, auteur d'un Harivaṁsá et du Nṛsimha purāṇam qui confirme sa maîtrise dans le genre des prabandha. Ces trois poètes (kavitraya), répondent aux « trois gemmes » kannara (cf. langue et littérature kannara) et représentent la norme classique.

Dans le courant śivaïte, Nannicōḍa compose, vers 1130, un poème de plus de deux mille vers, oublié jusqu'en 1914, le Kumārasaṁbhava, d'un fort tempérament, dont la disgrâce imméritée s'explique par l'usage de formes et de constructions populaires, plus proches du tamoul ou du kannara que du sanskrit. Après lui, Pālakuriki Sōmanātha (1200-1240), ardent propagandiste vīraśaiva (il écrit aussi en sanskrit et en kannara), dans un style à la fois populaire et facile, dans le mètre indigène dvipāda, montre une grande habileté poétique sur des thèmes variés : son Basāva purāṇa étend jusqu'au Mysore le renom de l'auteur et le Panditārādhya caritram, de caractère encyclopédique, est un excellent miroir de son temps. Sōmanātha symbolise ce xiie siècle de poésie śivaïte sous le patronage des Kākatiya de Warangal dont Pratāparudra, roi, poète et vīraśaiva, est le fleuron.

Au début du xiiie siècle, dans la langue fluide et simple héritée de Sōmanātha, Buddha Reddi écrit le Raṅganātha Rāmāyaṇa,[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, directeur de l'École française d'Extrême-Orient

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