TEMPLIERS
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Les Templiers, ordre monastico-militaire, réalisèrent l'idéal de cette double vocation apparemment contradictoire de moine et de soldat. Ils répondirent à un besoin particulier de l' Église à une époque où celle-ci s'efforçait d'humaniser la guerre et où la lutte entre deux civilisations, chrétienne et musulmane, exigeait l'action d'une élite. Le dépouillement de centaines de documents a permis de poser en termes nouveaux le problème du Temple et de mettre en valeur le gouvernement, la grandeur militaire, l'influence internationale dans l'économie et les finances, et les données réelles de l'existence de l'ordre. Il faut se garder d'inclure dans les problèmes relatifs au Temple bon nombre de questions encore mal élucidées et dont rien ne prouve qu'elles soient effectivement rattachées à cet ordre. Les Templiers eurent une vie et une observance beaucoup plus simples qu'on ne l'a cru. Ils furent avant tout des religieux et des soldats, mais encore des administrateurs, des diplomates et des financiers.
Origines et gouvernement
Deux chevaliers français, Hugues de Payns et Geoffroy de Saint-Omer, fondèrent à la fin de l'année 1119 l'ordre des Pauvres Chevaliers du Christ, que l'on appellera plus tard l'ordre du Temple. Les deux fondateurs décidèrent de se mettre au service des pèlerins et se placèrent sous la protection de Baudouin II, qui venait d'être couronné roi de Jérusalem le jour de Noël de cette même année dans l'église de Bethléem. Le patriarche Garimond reçut les vœux des premiers frères, selon les us et coutumes des chanoines réguliers du Saint-Sépulcre, dont les Templiers conservèrent les rituels ; ces rituels provenaient de Saint-Victor de Paris par l'intermédiaire de Godefroi de Bouillon.
Le courageux et actif Hugues de Payns s'installa avec ses premiers frères dans une demeure que leur assigna le roi Baudouin dans la partie méridionale du Temple de Salomon. Dès le début, plusieurs frères vinrent grossir la jeune milice, et notamment Hugues de Troyes, comte de Champagne (au grand scandale de saint Bernard), et Foulques d'Anjou, qui servira en qualité de « frère à temps » (pendant une durée limitée). Le recrutement se fit progressivement puisque les actes révèlent les noms de quatorze frères chevaliers à l'ouverture du concile de Troyes (1128).
En 1127, Hugues de Payns passe en Occident avec cinq frères pour obtenir du Saint-Siège la confirmation de son institut. Il est renvoyé devant le concile de Troyes qui s'ouvre sous la présidence du cardinal d'Albano, ancien prieur de Saint-Martin-des-Champs de Paris. L'assemblée conciliaire comprenait, outre le légat, douze archevêques et évêques, quatre abbés bénédictins et quatre abbés cisterciens. Les Pères mirent au point la règle donnée par Garimond, en louant ce qu'ils estimaient profitable et en retranchant ce qui ne leur semblait pas justifié. Bernard de Clairvaux s'étant dérobé, Jean Michel écrivit les soixante-douze articles approuvés par le concile. Le premier maître parcourut ensuite une partie de la France et de l'Angleterre. De nombreuses donations furent faites alors par des évêques, des chanoines, des seigneurs, des abbés, et par le grand nombre de prosélytes partis vers la Terre sainte dès 1131. Hugues de Payns demanda plusieurs fois à l'abbé de Clairvaux d'encourager la jeune milice, mais Bernard ne fut jamais très favorable à ce système de vie monastique ; le souvenir d'Arnaud, abbé de Morimond, ainsi que le choix du comte de Champagne semblent être à l'origine de cette hargne. Toutefois, il écrivit vers 1135-1136 le De laude novae miliciae, traité dans lequel il signale ne pas connaître l'ordre du Temple. Au mois de mars 1139, le pape Innocent II confirme l'institution des moines combattants par sa bulle Omne datum optimum. Cette confirmation favorisa le développement temporel de l'ordre, auquel s'ajoutèrent de nombreux privilèges et exemptions. Il en résulta, aussi bien en Orient qu'en Occident, un accroissement considérable des biens et du nombre des frères. À la mort du deuxième maître du Temple, Robert de Craon, on comptait uniquement pour la maison de Jérusalem deux couvents – ensemble des troupes de combat, comprenant trois cent cinquante chevaliers –, environ mille deux cents sergents, sans compter les autres membres donnés ou à temps. Au xiiie siècle, plusieurs provinces étaient établies : Provence, France, Poitou, Bourgogne, Angleterre, Aragon-Catalogne, Castille, Portugal, Toscane-Lombardie, Sicile-Pouilles, Hongrie, Magdebourg, Mayence, et les deux sous-provinces de Trèves en Allemagne et du royaume de Valencia en Espagne, dès 1242. En Palestine, le Temple comprenait trois grandes provinces : Jérusalem, Tripoli, Antioche et, vers 1257, la sous-province commerciale de Petite Arménie. L'ensemble de ces provinces groupait trois mille quatre cent soixante-huit châteaux, forteresses et maisons dépendantes. Tout ce monde était placé sous la juridiction du chapitre général, seule autorité de l'ordre qui désignait les commandeurs de province. Dans les pays de combat, comme la Palestine et la péninsule Ibérique, les châteaux étaient soumis à la juridiction de ces commandeurs de province ou « commandeurs de terre » qui nommaient à leur tour les commandeurs de leur choix. En revanche, dans les pays de rapport, un système hiérarchique de maisons fut établi : chaque province était divisée en régions, ayant chacune à sa tête le commandeur régional, membre de droit de la chambre priorale et capitulaire ; venaient ensuite les commandeurs majeurs, ou baillis, qui supervisaient plusieurs maisons dans une région.
Le chapitre général, représenté hors des sessions par le maître, se réunissait tous les ans en Palestine ; tous les dignitaires y participaient, tandis que les grands baillis et prieurs des territoires d'Europe ne s'y rendaient que tous les cinq ans. Le premier chapitre connu eut lieu en 1147 et fut ouvert à Paris sous la présidence du pape Eugène III et du roi de France Louis VII. Dès cette époque furent édictées les prérogatives du maître, qui se bornaient au maintien de l'observance et à la nomination des petits officiers de l'ordre.
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Écrit par
- Laurent DAILLIEZ : docteur en histoire, diplômé de l'École pratique des hautes études (IVe section)
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