TEMPS
Le temps physique
Parmi les diverses grandeurs définies et étudiées par le physicien avec l'idéal constant de parvenir à les rendre mesurables, le temps possède des caractères propres. Par la richesse de ses implications qui ne concernent pas la physique (implications sociologiques, biologiques, psychologiques, métaphysiques), il s'entoure d'une aura non dénuée de quelque mystère : « Si on ne me le demande pas, je crois savoir ce qu'est le temps, écrivait saint Augustin. Mais si on me le demande, je ne le sais plus. » Malgré toutes les réflexions faites et les connaissances accumulées à son propos, et par de nombreux spécialistes, le visage tant scruté du temps reste par certains côtés celui d'un sphinx.
« La vérité recule, écrivait Henri Poincaré, mais le savant avance. » Dès son origine, la mécanique de Kepler, de Galilée, de Newton, de Huygens a su définir de manière opératoire le temps comme une grandeur mesurable et, plus tard, légaliser de mieux en mieux cette définition (cf. galilée, huygens, kepler, mécanique céleste, newton). Par la suite, l'électromagnétisme, puis l'optique, en liaison d'abord avec la mécanique classique et ensuite, beaucoup plus fondamentalement, avec la mécanique quantique, ont permis des progrès considérables sur le plan de la technologie de la mesure et sur celui des définitions fondamentales (cf. lasers, maser, effetmössbauer).
Aux anciennes définitions légales de l'étalon de temps, fondées sur la durée du jour solaire moyen ou du jour sidéral, puis de l'année tropique, a été substituée, en 1968, par décision du Bureau international des poids et mesures (B.I.P.M.), une définition fondée sur la période d'une radiation judicieusement choisie dans le spectre du césium 133. Cette décision doit évidemment être rapprochée de la décision antérieure du B.I.P.M. de substituer, en 1960, à l'étalon matériel des longueurs (mètre en platine iridié, conservé au pavillon de Breteuil à Sèvres) l'étalon optique représenté par la longueur d'onde d'une radiation choisie dans le spectre du krypton 86. Cela ne fut légalement possible qu'à la suite de l'expérience de Michelson-Morley qui démontrait, en 1887, l'inexistence du « vent d'éther ». Rapprochée de la précédente, cette définition met en évidence le rôle essentiel que joue la vitesse de la lumière dans le vide c, rapport entre la longueur d'onde et la période d'une radiation électromagnétique ou optique, ainsi que le rôle de la théorie de la relativité qui légalise le concept de l'invariance absolue de cette vitesse c (cf. einstein, espace-temps, relativité). Au total, quatre expériences de métrologie fondamentale sont ici en interaction étroite : expérience de Michelson-Morley, chronométrie hertzienne ou atomique, métrologie optique ou atomique, mesures de la vitesse de la lumière dans le vide.
L'ensemble de ces technologies a connu des progrès si décisifs que, par décision de la 17e Conférence générale des poids et mesures tenue en octobre 1983, le mètre est dorénavant défini comme « la longueur du trajet parcouru dans le vide par la lumière pendant une durée de 1/299 792 458 de seconde ». La définition de la seconde reste celle qui a été adoptée en 1968 : la seconde est la durée de 9 192 631 770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les deux niveaux hyperfins de l'état fondamental de l'atome de césium 133. La précision avec laquelle se trouve ainsi défini le mètre est supérieure à celle que permettrait le meilleur des étalons matériels. La résolution du B.I.P.M. s'accompagne de recommandations incluant une liste de radiations des domaines optique et hertzien pouvant être utilisées comme étalons secondaires du temps et, par conséquent, de la longueur.[...]
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Écrit par
- Hervé BARREAU : maître de recherche au C.N.R.S., responsable de l'E.R. fondements des sciences
- Olivier COSTA DE BEAUREGARD : auteur
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