TEOTIHUACÁN
À 40 kilomètres au nord-est de la ville de Mexico, le site de Teotihuacán abrite les ruines de la principale métropole méso-américaine de la période Classique. À son apogée, entre 450 et 600 de notre ère, elle occupait environ 20 kilomètres carrés, peuplés, d'après les estimations des archéologues, par plus de cent mille habitants, auxquels s'ajoutaient de nombreux marchands, visiteurs et pèlerins, attirés par son prestige et son importance économique, politique et religieuse.
La planification d'une ville
Le choix de son emplacement contribua au rayonnement de Teotihuacán, car les ressources naturelles de la vallée furent largement exploitées par ses habitants. Outre la rivière San Juan, les rivières Huixco et San Lorenzo irriguaient les plaines voisines riches en denrées agricoles. La faune abondait – cerfs, sangliers, lièvres, dindons, et les nombreuses espèces d'oiseaux migrateurs arrivant en hiver – et les lacs de Texcoco fournissaient en quantité du poisson et du gibier d'eau. Les collines environnantes livraient le bois pour la construction – chênes, pins, cèdres –, ainsi que le basalte pour la sculpture ou la ponce volcanique pour les bâtiments. En l'absence d'outils métalliques, l'obsidienne réputée pour son tranchant était indispensable. Il y avait dans la ville des ateliers pour tailler cette roche, dont les gisements se situaient à environ 20 kilomètres au nord-est. Les pigments minéraux utilisés pour les peintures murales qui décoraient les édifices se trouvaient dans des gîtes voisins de la cité.
Les visiteurs de Teotihuacán sont d'emblée frappés par son plan orthogonal, dont le tracé répond en fait à des impératifs cosmologiques. L'axe nord-sud est marqué par l'Allée des Morts, longue de cinq kilomètres, et bordée d'édifices administratifs, de somptueux palais, ainsi que de temples érigés en l'honneur des diverses déités préhispaniques. L'avenue est-ouest longe la rivière San Juan, dont le cours fut aménagé. Ces axes sont définis selon des directions symboliques, comme le coucher du soleil. Cette précision témoigne de la maîtrise de l'astronomie de la part des bâtisseurs qui ont fondé, au début de notre ère, cette cité divisée en quatre quartiers, chiffre qui évoque les quartiers du monde. Cette division reflèterait aussi une organisation politique collégiale, comme le suggère le palais de Xalla. Si les palais qui bordent l’Allée des Morts, comme celui de Quetzalpapalotl, semblent pour chacun d’entre eux former une unité résidentielle, celui de Xalla, protégé par une muraille surmontée d’un chemin de ronde, est divisé en quatre secteurs dont chacun aurait abrité une famille dirigeante.
Parmi les monuments religieux de Teotihuacán, la pyramide du Soleil, d'une hauteur de 75 mètres pour 225 mètres de côté, est la plus volumineuse. Malgré son importance évidente, cet édifice est décentré : il se situe à l'est de l'Allée des Morts. Son implantation est probablement déterminée par la présence, dans son sous-sol, d'une grotte et d'une source, deux éléments sacrés de l'idéologie préhispanique.
À l'extrémité nord de l'Allée des Morts se trouve la pyramide de la Lune dont la morphologie reproduit le profil du Cerro Gordo, montagne située en arrière-plan. Des travaux ont révélé l’existence de sept étapes de construction qui se sont succédé sur trois cents ans. Sur l'axe nord-sud de la pyramide ont été découvertes quatre concentrations funéraires composées de nombreux corps humains, dont certains sacrifiés, accompagnés de riches offrandes, parmi lesquelles figurent des animaux. L'esplanade située au pied de la pyramide de la Lune pouvait réunir des milliers de gens.
On repère à Teotihuacán plusieurs autres lieux de concentration publique. La Ciudadela,[...]
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Écrit par
- Rosario ACOSTA NIEVA : docteure en archéologie à l'université Paris I-Panthéon Sorbonne, chercheuse associée Universidad de Guadalajara (Mexique)
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Médias
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