TERRE Structure interne
Le puzzle de la convection mantellique
L'étude de la convection mantellique est, en sciences de la Terre, le meilleur exemple de mise en œuvre de nouveaux outils et méthodes disponibles dans le cadre d'une approche interdisciplinaire.
Convection, plaques tectoniques, points chauds et panaches volcaniques
Depuis l'avènement de la tectonique des plaques, il est devenu possible de décrire quantitativement les mouvements à la surface de la Terre. Les plaques tectoniques, considérées comme des corps rigides, sont la manifestation en surface de mouvements profonds de matière (courants chauds ascendants et courants froids descendants) qui permettent l’évacuation de la chaleur de la Terre due à la radioactivité de plusieurs éléments chimiques (principalement uranium 235 et 238, thorium 232 et potassium 40) et au refroidissement du noyau. Cette circulation de matière à l’intérieur de la Terre, par le mécanisme de la convection thermique, est relativement lente (quelques centimètres par an) et la matière en mouvement (roches) reste solide mais très visqueuse (ductile), c’est-à-dire déformable sur le très long terme. La convection thermique dans la Terre est connue depuis les années 1930, notamment grâce aux travaux d’Arthur Holmes (1931) et de Chaim Pekeris (1935). Elle est responsable de nombreux processus dynamiques tels que la surrection des montagnes, l'activité volcanique et sismique, la subduction des plaques et l’expansion des fonds océaniques. Ces divers phénomènes constituent la première manifestation des particularités de la convection mantellique, car ils montrent qu’il existe de gigantesques variations dans les propriétés rhéologiques (liées au comportement de la matière sous l’effet d’une contrainte) du matériau terrestre entre les plaques rigides (constituées par la lithosphère) et le manteau sous-jacent plus visqueux ne pouvant être expliquées par les modèles 1D (qui n’autorisent pas les variations latérales des propriétés physiques et chimiques).
En 1963, le Canadien John Tuzo Wilson identifie des zones de volcanisme dit de point chaud, engendrant, souvent au milieu des océans, des volcans très actifs (tels que ceux d’Hawaii et de la Réunion). De façon surprenante, ces points chauds semblent fixes par rapport aux mouvements des plaques, formant des alignements de volcans sur celles-ci. L’Américain William Jason Morgan, dans les années 1970, a proposé que leur origine doit être recherchée dans le manteau inférieur, voire à l’interface manteau-noyau. Malgré sa puissance et son caractère prédictif, la théorie de la tectonique des plaques ne peut expliquer l’existence de ces points chauds à la surface de la Terre. En effet, elle cantonne l’ensemble de l’activité sismique et volcanique aux frontières des plaques, alors que le plus grand nombre des points chauds sont situés au milieu de celles-ci. Les géodynamiciens s’accordent à penser que l'origine des points chauds et des grandes provinces magmatiques observés en surface est due à des panaches, c’est-à-dire des remontées de roches solides très profondes anormalement chaudes du manteau qui finissent par arriver à la base de la lithosphère pour former les magmas en fusion alimentant des volcans dits de points chauds et de grands épanchements basaltiques. Les panaches prennent naissance à l’interface entre deux couches très peu miscibles. Mais la profondeur d'origine des points chauds reste controversée : cette matière chaude provient-elle de la limite manteau inférieur-noyau externe (à 2 900 km de profondeur), ou de la base du manteau supérieur (à 660 km de profondeur), voire de l’asthénosphère (vers 220 km de profondeur) ? Les propriétés mécaniques de la lithosphère rigide – très différentes de celles de l’asthénosphère sous-jacente qui est plus facilement déformable – et l'existence de points chauds sont deux exemples simples illustrant le fait que la convection mantellique diffère à[...]
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Écrit par
- Jean-Paul MONTAGNER : professeur des Universités, Institut de physique du globe de Paris, membre senior de l'Institut universitaire de France
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