TERRE Structure interne
La tomographie sismique : le scanner de la Terre
La détermination de modèles 3D de paramètres sismiques du manteau (également appelés modèles tomographiques, du grec tomos, « coupe ») peut être considérée comme une approche pragmatique qui consiste à imager puis imaginer la structure de la convection afin de fournir des indices sur la nature des mécanismes d'entraînement de la matière et d'étudier les processus convectifs du manteau, moteur de la tectonique des plaques. Grâce à l'utilisation massive d'ordinateurs capables de gérer de très grands ensembles de données, les techniques de tomographie sismique peuvent imager la structure actuelle profonde en trois dimensions de la Terre, fournir des contraintes très fortes sur les modèles possibles de la convection mantellique et permettent de tester différentes hypothèses concurrentes.
L’imagerie de la Terre par les ondes sismiques
La propagation des ondes sismiques est très sensible aux variations de température, chimiques et minéralogiques. Ces anomalies de température reflètent la dynamique active de la Terre qui serait, sans elles, une planète morte. Il a été observé, depuis les années 1960, que la vitesse de propagation des ondes sismiques au-dessous de la croûte est beaucoup plus grande sous les continents que sous les océans. Cette distinctionentre les provinces tectoniques s'explique par une histoire différente : les cratons, parties centrales des continents et âgés de plus d'un milliard d'années, ont eu le temps de se refroidir, tandis que la lithosphère sous les océans, plus jeune et plus chaude, est recyclée en permanence dans le manteau par le phénomène de subduction. Une augmentation de la température se traduit généralement par une diminution de la vitesse des ondes sismiques, tandis qu'une augmentation de la pression se traduit par une augmentation de la vitesse. À une profondeur donnée (donc à pression approximativement constante), les variations latérales de la vitesse de propagation des ondes sismiques sont principalement interprétées par des variations de température. Une grande variété de modèles tomographiques, fondés sur des données sismiques et des techniques différentes, mais similaires à l'échographie médicale ou au scanner, ont été développés pour obtenir la structure 3D de la Terre, en s’affranchissant de la géologie de surface.
Les premiers modèles 3D du manteau terrestre ont été proposés à la fin des années 1970 mais la véritable révolution de la tomographie sismique a eu lieu au milieu des années 1980 lorsqu'un ensemble complet de modèles tomographiques a été proposé depuis la surface jusqu’au centre de la Terre. Il devient alors possible d’imager les variations latérales de vitesse à l’échelle globale avec une résolution spatiale de l’ordre de 500 kilomètres. Les modèles tomographiques ont fondamentalement renouvelé notre vision de la dynamique de la Terre et apporté un éclairage nouveau sur les processus profonds.
À 125 kilomètres de profondeur (correspondant à la base de la lithosphère océanique et au cœur des continents), la distribution des anomalies de la vitesse sismique (variations de vitesse par rapport au modèle de référence à une dimension) reflète la structure géologique de la surface de la Terre. Presque toutes les limites des plaques sont caractérisées par des vitesses sismiques lentes car ces zones sont souvent associées à un volcanisme actif (ce qui implique une augmentation de température et, donc, une diminution de la vitesse de propagation des ondes sismiques). Dans les régions océaniques, la vitesse sismique augmente avec l'âge du fond océanique, confirmant le refroidissement des plaques avec l'âge. Cet accord remarquable entre les données sismiques et celles qui sont déduites de la tectonique des plaques a été la première preuve de la validité de l'approche tomographique.[...]
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Écrit par
- Jean-Paul MONTAGNER : professeur des Universités, Institut de physique du globe de Paris, membre senior de l'Institut universitaire de France
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