TÉTRAPODES
Les poissons précurseurs des tétrapodes
Les sarcoptérygiens se caractérisent notamment, par rapport aux actinoptérygiens, par la présence dans leurs nageoires et leurs membres pairs d’une articulation monobasale (formée par un seul os rattaché à la ceinture pectorale ou pelvienne et soutenue par une importante musculature). Cet os unique reliant les nageoires paires à leur ceinture est l’homologue de l’humérus du bras ou du fémur de la jambe de l’humain et constitue donc le premier élément de la patte porteuse des tétrapodes. Les sarcoptérygiens sont connus par de nombreux fossiles et formaient le principal groupe de poissons osseux au Dévonien (419 à 359 millions d’années). Cependant, leur diversité passée était beaucoup plus importante, puisqu’ils ne sont plus représentés que par trois groupes dans la faune actuelle : les cœlacanthes, avec deux espèces du genre Latimeria vivant dans le canal du Mozambique et les côtes d’Indonésie ; les dipneustes avec six espèces regroupées dans trois genres (Neoceratodus, Lepidosiren et Protopterus) que l’on retrouve dans les eaux douces d’Australie, d’Amérique du Sud et d’Afrique ; et les tétrapodes.
Le nombre et la diversité de poissons sarcoptérygiens actuels étant très réduits, il devient difficile de reconstruire de manière détaillée l’histoire évolutive de la transition entre les poissons et les tétrapodes puisque les différences morphologiques entre les espèces vivantes sont trop marquées. Seules la découverte et l’étude des sarcoptérygiens fossiles nous permettent de connaître l’origine des caractères associés à la vie terrestre et de mieux reconstruire les différentes étapes de la transition « poissons-tétrapodes », l’un des épisodes évolutifs les plus importants dans l’histoire des vertébrés.
Parmi les caractères typiques des vertébrés terrestres, on compte les poumons, des organes spécialisés permettant de respirer l’oxygène atmosphérique. Cependant, leur origine remonte bien en amont de celle des premiers restes fossiles de tétrapodes, puisqu’on considère que des poumons rudimentaires étaient déjà présents chez les premiers sarcoptérygiens il y a plus de 420 millions d’années. En effet, les cœlacanthes actuels conservent un poumon vestigial qui témoigne de la longue histoire évolutive de cet organe et de son statut de caractère commun à l’ensemble des sarcoptérygiens. De leur côté, les dipneustes (ou poissons pulmonés) possèdent des poumons fonctionnels associés encore à l’usage des branchies permettant à certaines espèces de vivre au ralenti (estiver) pendant la saison sèche en s’enfermant dans un cocon de boue percé d’une seule ouverture pour laisser passer de l’air. Ainsi, on pense que tous les poissons sarcoptérygiens devaient avoir initialement une respiration mixte faisant intervenir aussi bien les branchies que les poumons et leur permettant de coloniser tous les environnements aquatiques ou intermédiaires entre terre ferme et eau.
Les dipneustes sont les sarcoptérygiens actuels les plus proches parents des tétrapodes. Cependant, pour mieux comprendre l’origine des vertébrés terrestres et leur sortie des eaux, il faut s’intéresser au groupe des tétrapodomorphes (qui inclut tous les sarcoptérygiens plus proches parents des tétrapodes que des dipneustes) et à ses nombreux représentants fossiles. Ils se caractérisent, entre autres caractères, par la présence de narines internes (ou choanes) qu’ils partagent avec les tétrapodes et qui nous permettent de respirer en gardant la bouche fermée. Cependant, des découvertes effectuées dans les années 2010 ont mis en évidence que de nombreux tétrapodomorphes, incluant les premiers tétrapodes, respiraient l’air par l’oreille, grâce à un conduit homologue de notre trompe d’Eustache et correspondant au spiracle des poissons (trou situé derrière l’œil). Les narines n’avaient alors qu’un[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Philippe JANVIER : directeur de recherche émérite au CNRS
- Jorge MONDÉJAR FERNÀNDEZ : docteur en paléontologie (Muséum national d'histoire naturelle, Paris), postdoctorant au Musée Senckenberg, Francfort (Allemagne)
Classification
Médias
Autres références
-
AMPHIBIENS ou BATRACIENS
- Écrit par Pierre CLAIRAMBAULT , Philippe JANVIER et Jean-Claude RAGE
- 6 177 mots
- 19 médias
Le passage de la vie aquatique à la vie terrestre est anatomiquement associé à la réalisation du membre chiridien (ou chiridium).Ce membre (antérieur ou postérieur), construit sur le même plan chez tous les Tétrapodes, se compose de deux unités principales : l'archépodium proximal (stylopode + zeugopode),... -
CARBONIFÈRE
- Écrit par Alain BLIECK
- 1 170 mots
C'est dès le xviiie siècle que Richard Kirwan a introduit le terme carbonifère pour désigner des roches productrices de charbon et le mot a désigné les dépôts houillers de Grande-Bretagne et d'Europe occidentale à partir du xixe siècle. Aujourd'hui, le Carbonifère représente...
-
CIRCULATOIRES (SYSTÈMES) - Les systèmes circulatoires des animaux
- Écrit par Jean-Paul TRUCHOT
- 4 530 mots
- 7 médias
Avec l'apparition de la vie aérienne chez les vertébréstétrapodes, une double circulation s'instaure, et les deux circulations, systémique et pulmonaire, se séparent entièrement chez les homéothermes, oiseaux et mammifères (fig. 4d). De ce fait, les résistances vasculaires systémique... -
CRÂNE
- Écrit par Yves FRANÇOIS , Didier LAVERGNE et Pierre-Antoine SAINT-ANDRÉ
- 5 245 mots
- 5 médias
Il se développe comme celui du crâne d'un sélacien. Un chondrocrâne s'édifie avec les mêmes éléments de base (trabécules, paracordaux, capsules...). Puis interviennent des phénomènes d'ossification de deux types. - Afficher les 17 références