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TEXTES (Grèce antique)

Jusqu'au xixe siècle, la connaissance de la civilisation grecque reposa avant tout sur la tradition manuscrite ; depuis lors, l'essor de l'archéologie a fourni une masse sans cesse accrue d'objets de tous ordres qui ont révélé une « civilisation matérielle » qui n'apparaissait qu'allusivement dans les textes. Quel que soit l'intérêt historique et esthétique de tous ces objets, qui ont ouvert nombre de perspectives nouvelles, l'apport des textes reste cependant essentiel à la compréhension profonde de la Grèce antique, et cela d'autant plus qu'aucune des trois grandes catégories de documents écrits grecs ne constitue encore un ensemble clos.

Les manuscrits sur parchemin

Les inscriptions et les textes sur papyrus n'étant entrés véritablement dans le champ du savoir qu'au xixe siècle, ce sont les manuscrits sur parchemin qui ont, pendant quinze siècles, assuré le rayonnement et la survie de la civilisation grecque : aussi chaque « renaissance » a-t-elle été d'abord un effort pour rassembler, publier et commenter les manuscrits des auteurs grecs. La première entreprise de ce genre a eu pour centre le musée d'Alexandrie, véritable foyer de recherches fondé par Ptolémée Ier au début du iiie siècle avant J.-C. pour constituer et transmettre un corpus du savoir grec. Un travail considérable de choix et de critique des textes à partir des volumes alors en circulation fut réalisé là par des générations de philologues éminents, dont le plus célèbre est Aristarque (217-145 av. J.-C.), à qui l'on doit l'établissement du texte d'Homère, accompagné de commentaires. On estime que cette bibliothèque centrale du monde grec devait rassembler environ 500 000 volumes lorsqu'elle brûla en 47 avant J.-C., catastrophe irréparable même si la bibliothèque rivale fondée à Pergame par les rois attalides et la bibliothèque du gymnase de Ptolémée, à Athènes, ont pu pallier en partie sa perte. Cette dernière, constituée de copies des archétypes du musée d'Alexandrie, fut magnifiquement installée par Hadrien, en 131-132, dans un bâtiment qui devint le nouveau centre de l'érudition philologique, jusqu'au transfert du fonds à Constantinople par Constantin, au début du ive siècle. Entre-temps, le support des textes avait changé : le livre en parchemin (codex), plus solide et économique, avait remplacé le rouleau de papyrus (volumen), cher, fragile et encombrant. Tous les textes existant sur papyrus ne furent pas transcrits, et ce phénomène de déperdition se reproduisit lorsqu'on passa au ixe siècle de l'écriture onciale en majuscules à la cursive. Heureusement, cette transcription limitative se produisit dans le cadre de la « renaissance byzantine » qui suivit la fin de l'iconoclasme. Une deuxième fois, on s'efforça alors d'épurer la tradition obscurcie en établissant de nouvelles éditions commentées, qui sont la base même de notre connaissance de la littérature grecque : aucun de nos 55 000 manuscrits grecs connus (dont environ 5 000 en France et 2 800 à la Bibliothèque nationale de France) ne remonte au-delà. Sur les neuf cents auteurs ainsi conservés, cent ne le sont que par une unique copie remontant à un prototype de cette époque. Pour mesurer l'ampleur de la déperdition, accentuée par les terribles vicissitudes qu'a connues ultérieurement l'hellénisme, il suffit d'indiquer que l'on connaît environ 10 p. 100 seulement des œuvres attestées. Mais combien ont dû disparaître sans laisser même une mention de leur existence ?

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Écrit par

  • : ancien membre de l'École française d'Athènes, professeur émérite d'archéologie grecque à l'université de Paris-X-Nanterre

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