TEXTES (Grèce antique)
Les papyrus
L'apport des papyrus trouvés en Égypte n'en est que plus précieux : certains proposent des variantes, très antérieures aux manuscrits, de textes déjà connus ; mieux encore, d'autres révèlent des textes nouveaux, parfois d'un intérêt majeur. C'est ainsi que furent découverts, en 1890, la Constitution des Athéniens d'Aristote (British Museum, Londres) et, en 1957, la première comédie complète de Ménandre, L'Atrabilaire (collection Bodmer, Genève). Sans les papyrus, malheureusement presque toujours fragmentaires, d'autres auteurs importants comme Archiloque (viie s.), Bacchylide (ve s.) ou Hérondas (iiie s.) seraient réduits à quelques citations insignifiantes. La très grande majorité de ces papyrus littéraires datent des iie et iiie siècles après J.-C., apogée de l'Égypte gréco-romaine. Il s'agit dans la plupart des cas de papyrus jetés au rebut ou remployés comme rembourrages de momies, c'est-à-dire de paperasses jugées désormais sans valeur : vieux livres et travaux d'élèves, mais aussi actes officiels et pièces de comptabilité, correspondances privées ou d'affaires, écrits techniques de toutes sortes, etc. Ces dizaines de milliers de documents, qui ne sont encore que très partiellement édités et étudiés, révèlent des aspects inconnus de la civilisation grecque, à l'époque hellénistique et impériale, dans le milieu très particulier que constitue l'Égypte colonisée par les Grecs à la suite d'Alexandre : l'administration, la vie économique et quotidienne, les sentiments et les croyances s'en trouvent éclairés avec une richesse de détails que ne fournit aucun autre type de documents de l'Antiquité classique. Malheureusement, les conditions dans lesquelles ont été rassemblés les documents qui constituent les grands fonds européens (Vienne, Londres, Berlin, Paris, Florence) ont été déplorables. Jusqu'aux premières fouilles méthodiques, mais cursives, de B. P. Grenfell et A. S. Hunt à Oxyrhynchos (1895-1907), les papyrus furent recueillis par les paysans ou par des trafiquants sans scrupules : les documents jugés non négociables, parce que trop fragmentaires ou tardifs, étaient tout simplement détruits ; beaucoup d'autres étaient mutilés sciemment ou faute de soin au moment de leur découverte. Ainsi des ensembles ont-ils été dispersés, des pièces intactes démembrées. On estime aujourd'hui qu'une bonne moitié des papyrus découverts au xixe siècle a aussitôt disparu de la sorte. Même si cette fièvre s'est calmée depuis la Première Guerre mondiale avec la fin des trouvailles massives du Fayoum, les découvertes sporadiques, officielles et clandestines continuent ; mais le grand barrage d'Assouan, qui a entraîné une humidité permanente du sol égyptien, risque d'être fatal à terme aux papyrus encore enfouis. Quoi qu'il en soit, après les temps héroïques de la collecte et du défrichage des fonds, la papyrologie est entrée dans l'ère des publications systématiques et thématiques, rendant ainsi possible, au moins pour l'Égypte gréco-romaine, une histoire sociale et économique qui reste très aléatoire pour le reste du monde grec, faute d'archives correspondantes.
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Écrit par
- Bernard HOLTZMANN : ancien membre de l'École française d'Athènes, professeur émérite d'archéologie grecque à l'université de Paris-X-Nanterre
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