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THAÏ

Panorama linguistique

Les Thai (parlant des langues thai, de la famille dite des langues dai ou kadai), y compris ceux qui vivent en Chine, sont au nombre d'environ 65 millions. Ils occupent un territoire qui s'étend entre le 7e et le 26e degré de latitude nord et entre le 94e et le 110e degré de longitude est. Les divers parlers thai sont remarquablement homogènes, et cette relative unité linguistique est le meilleur critère de définition ethnique de ces peuples. Il s'agit d'un grand ensemble ethno-linguistique, qui présente des différences culturelles du fait des influences reçues et du voisinage d'autres groupes, des différences physiques aussi, en raison d'assimilations par mariages mixtes, sur des aires communes. Mais ces quelques « variantes » n'entament ni l'unité de substrat ni l'appartenance à une « famille » cohérente et strictement définie.

Considérés comme s'étant dispersés à partir de la Chine du Sud, ils ont contribué à la « thaïsation » des pays où ils s'installaient, grâce à leurs structures socio-politiques solides, et ils ont ainsi abouti à la création de grandes aires linguistiques et culturelles, toujours en place dans l'actuelle carte ethno-linguistique de l'Asie du Sud-Est – carte en mouvement, pourrait-on dire, puisque l'éclatement de certains villages et la thaïsation se poursuivent en certains lieux.

La nomenclature des groupes linguistiques est difficile à établir en raison de l'imprécision des dénominations thai elles-mêmes, du fait aussi que les Chinois, les Siamois, les Français et les Anglais ont désigné ces groupes par des noms différents.

Les critères de classification adoptés par les auteurs sont eux-mêmes très variés : localisations géographiques, relations interlinguistiques, peuples à écriture ou sans écriture, gens des terres basses ou hautes, types d'institutions socio-politiques, développement historique divergent, aires ethnographiques ou littéraires...

La classification chinoise actuelle des groupes de langues thai, publiée par Li Fanggui en 1943, 1957 et 1959, comprend trois grandes subdivisions : 1. Les dialectes thai du Nord, du Houei-tcheou (Ghizou) et du Houang-si ; 2. Les dialectes kam-sui et sui (ou shui), au sud et au sud-est du Houei-tcheou ; 3. Les dialectes thai dits « du Centre », c'est-à-dire le thô et le nung.

Pour l'Anglais Bruk, qui publia une répartition statistique en 1960, les groupes s'organisent en quatre ensembles : chuang (zhuang), chung-chia (zhong-jia), tung (dong) et shui, ne considérant que ceux des provinces chinoises.

Enfin, le linguiste français A. G. Haudricourt inclut le groupe dai ou thai dans la famille linguistique des langues kadai, et énumère ainsi les principales : l'ahom, aujourd'hui disparue, autrefois parlée en Assam ; le khamti en Assam et dans le nord de la Birmanie ; le shan en Birmanie, ainsi que le khun ; le thai nua et le thai lu en Chine et au Laos ; le lao de Chieng Mai en Thaïlande ; le lao ou laotien au Laos et dans le nord-est de la Thaïlande ; le siamois ou thai klang en Thaïlande ; le thai dit blanc, rouge ou noir et le thô au Nord-Vietnam ; enfin, le nung au Nord-Vietnam et en Chine. Les chiffres les plus importants en 2005 concernent les gens de langue siamoise (21 millions) et ceux de langue lao (environ 19 millions répartis au Laos et en Thaïlande), auxquels il faut ajouter les 6,5 millions de gens parlant le yuon ou lao de Chieng Mai.

On voit la complexité de cette carte ethno-linguistique, alors que, selon une vue superficielle, le domaine thai devrait tout simplement se résumer en deux termes, siamois et laotien, ou même, aux yeux d'un public non informé, se réduire à un seul nom, celui de la Thaïlande.

— Solange THIERRY

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Écrit par

  • : membre de l'École française d'Extrême-Orient
  • : chargée du département Asie au musée de l'Homme, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)

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Exode nung - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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