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THÉÂTRE OCCIDENTAL L'École du spectateur

L'institutionnalisation

À partir de 1981, les ministères de la Culture et de l'Éducation nationale vont mettre en commun leurs moyens de réflexion. Dès 1983, une ligne budgétaire prévoit des financements pour les actions artistiques. Le ministère de l'Éducation nationale crée ainsi « un plan académique de formation » des enseignants pendant leurs heures de service. En 1983, l'Association nationale de recherche et d'action théâtrale (A.N.R.A.T.), soutenue par les ministères de l'Éducation nationale et de la Culture, qui rassemble des artistes et des enseignants engagés dans des actions d'initiation, de formation et d'accompagnement des jeunes aux pratiques théâtrales – principalement au sein de l'école mais également hors temps scolaire –, est créée. Malgré tout, le développement de l'éducation artistique dans les années 1980-1990 reste malaisé, toujours remis en question sur le plan financier, tandis que sa légitimité reste mal assurée. De leur côté, les théâtres publics s'engagent dans une logique libérale, moins militante. Ce sont alors les compagnies indépendantes qui prennent le relais. Sur le terrain, la tentation est grande alors de satisfaire à une « rentabilité sociale » (Michel Simonot), voulue par les collectivités locales pour lesquelles l'animation est devenue un enjeu électoral. La question de la qualité des animateurs se pose aussi, certaines compagnies ne survivant que grâce à ce type de travail. L'un des risques est également d'instrumentaliser les artistes, qu'ils soient auteurs dramatiques, acteurs ou metteurs en scène, en les confrontant à des populations difficiles, sans qu'ils soient préparés sur le plan pédagogique. Au milieu des années 1990, des stages communs aux enseignants et aux artistes apparaissent afin de permettre une initiation « aux différentes formes d'ateliers ou [de] perfectionner leurs interventions ». Mais la culture de l'évaluation commence à miner ces pratiques. De plus, la politique culturelle du ministère, en privilégiant l'épanouissement de l'œuvre artistique, fait qu'en 1997 un débat obsolète, oppose encore les tenants de l'art et ceux de l'action culturelle, comme s'il existait d'une part de « vrais » artistes et d'autre part des acteurs-animateurs indignes de ce nom.

Le changement s'opère au début du xxie siècle avec une prise de conscience de la part des éducateurs et des artistes. La multiplicité grandissante de l'offre culturelle, l'invention de nouveaux modes de récits, le soupçon porté sur la narration et la dramaturgie, les multiples croisements entre les arts rendent nécessaire une approche pédagogique du spectacle vivant qui permettra une meilleure compréhension des nouvelles esthétiques. En 2002, Pierre Etienne Heymann note une volonté commune de construire une politique culturelle en direction de l'école (par exemple par le biais des classes à Projet artistique et culturel des ministères Lang et Tasca, 2000), tout en concédant que le projet d'élargissement des publics a échoué. Les jeunes, qui ont fréquenté les salles de spectacle pendant leur scolarité et participé à des actions artistiques, cessent de venir au théâtre une fois leur scolarité terminée. L'échec de la démocratisation culturelle semble alors patent. À partir de 2005, les financements s'étiolent, l'État transférant aux collectivités territoriales la charge des partenariats structures culturelles-écoles. Si obligation est faite aux établissements scolaires dans le cadre de la L.O.L.F. (Loi organique relative aux lois de finance) d'avoir une politique culturelle, il n'est pas sûr que ceux-ci choisissent de développer les pratiques artistiques. En 2008, sous la pression des associations et des artistes, l'éducation artistique et culturelle (E.A.C.) « devient un élément central de la politique d'élargissement[...]

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