THÉÂTRE OCCIDENTAL Le mélange des genres
Danse, cirque, arts plastiques, musique
Figures de proue du spectacle vivant avec l'opéra, la danse et le théâtre se sont côtoyés ou ont fusionné au fil de leur histoire, se nourrissant d'échanges liés à leurs pratiques. Cette intégration a surtout été suscitée par l'expression corporelle liée au théâtre et la recherche de son évolution dans le mouvement, avant d'être associée de manière plus repérable dans la représentation. Le corps de l'acteur est au centre de l'acte théâtral : sa gestuelle, ses mouvements sont autant de signes qui accompagnent ou prolongent la perception d'un texte et d'une dramaturgie. À travers l'évolution des formes théâtrales, les recherches engagées par les pédagogues et théoriciens du théâtre – de la biomécanique de Meyerhold au théâtre-laboratoire de Grotowski –, d'abord tournées vers la formation de l'acteur, se sont développées jusqu'à introduire des séquences chorégraphiées dans le jeu dramatique. Une réflexion de Robert Wilson éclaire la portée de ce choix : « Pour moi, tout théâtre est danse. Donc tout est chorégraphié, dans un sens. Si vous partez des prémisses qu'il y a toujours mouvement, qu'il n'existe rien qui soit non-mouvement, alors quel que soit le moment où vous commencez à bouger, disons une main ou un pied, cela ne fait que continuer le mouvement qui est déjà là. Le plus difficile est de maintenir cette continuité. Parfois, quand on est très immobile, on est plus conscient du mouvement que quand on bouge dans tous les sens. Il faut commencer par le plus simple : dans l'immobilité il y a mouvement. » Cette notion de mouvement, avec la relation à l'espace qu'elle implique, reste une préoccupation importante chez beaucoup de metteurs en scène et se traduit à différents degrés dans leurs spectacles. Ils varient suivant l'apport souhaité, de l'approfondissement du jeu de l'acteur à travers une expression gestuelle à l'organisation de la circulation des comédiens sur le plateau. Une attitude, un geste, un mouvement sont révélateurs de sentiments que la parole ne peut exprimer. Mais, au-delà de cette seule dimension, on constate une intégration ponctuelle et séquentielle de chorégraphies plus ou moins brèves dans la représentation théâtrale. Suivant les orientations et les relations recherchées par une mise en scène, ces « tableaux dansés » répondent généralement à la nécessité de prolonger une perception sensorielle ou de favoriser une plus grande ouverture de l'imaginaire du spectateur. Certaines créations récentes montrent bien les différents impacts de la danse dans le théâtre. Résonances de Katherine Burger, dans une mise en scène d'Irina Brook (2000), qui accentuera l'apport chorégraphique pour un Juliette et Roméo inspiré de Shakespeare, où les Capulet et les Montaigu s'affrontent au rythme du hip-hop (2002), Platonov de Tchekhov réalisé par Eric Lacascade (2002), El Pelele de Jean-Christophe Bailly mis en scène par Georges Lavaudant avec la complicité du chorégraphe Jean-Claude Galotta (2003). Ou encore Christian Schiaretti qui, pour l'intégrale de Par-dessus bord de Michel Vinaver (2008), a demandé une chorégraphie expressive à Guesh Patti. En sens inverse, la danse contemporaine a également emprunté au théâtre. Il suffit de voir les chorégraphies de Maurice Béjart, Pina Bausch, Sacha Waltz, Maguy Marin, Josef Nadj, Alain Platel ou Angelin Preljocaj, entre autres pour en être convaincu.
Avec ses liaisons avec la danse et son intérêt porté tout au long du xxe siècle au langage du corps, le théâtre ne pouvait rester à l'écart des formes circassiennes. Outre le fait qu'il trouve dans les disciplines du cirque – clowns, acrobates, funambules, improvisation, jeu de masques – une pédagogie formatrice d'un nouveau type d'acteur,[...]
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Écrit par
- Jean CHOLLET : journaliste et critique dramatique
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Médias
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