THÉOGONIE, Hésiode Fiche de lecture
Toute-puissance divine et faiblesses humaines
Les principaux mythes du patrimoine grec sont évoqués dans la Théogonie. Mais, dans la multitude des divinités, Hésiode se limite parfois à une simple présentation généalogique. Il accorde toutefois davantage de place aux unions entre déesses et mortels, ou dieux et mortelles, qui enfantent la race des héros, promise à occuper une place centrale dans la littérature grecque de l'époque classique
Dans la Théogonie, Hésiode a tout particulièrement insisté sur le passage du chaos au cosmos, sur la victoire de l'ordre sur le désordre. Le monde se met d'abord en place grâce à un dieu sorti du chaos, Éros : « Le tartare naquit ; puis l'amour vint au monde. » Grâce à lui la terre, Gaïa, et le ciel, Ouranos, s'unissent. Anteros, frère d'Éros, permet également à l'univers de trouver une stabilité qui l'empêche de retourner au chaos originel. À chaque changement de génération divine, l'univers gagne en stabilité. Chaque combat permet alors de franchir une étape menant à l'ordre universel. Ainsi, à l'issue du combat mené par Zeus contre les Titans, s'impose une nouvelle génération de dieux olympiens, garants de la paix. Les scènes de « Titanomachie », d'affrontement contre les Titans, puis de « Gigantomachie », de combat contre les Géants, évoquées par Hésiode furent de nombreuses fois exploitées pour orner les frises des temples classiques, notamment celles du Parthénon.
Mais la Théogonie témoigne aussi d'une certaine inquiétude sur l'avenir de l'homme. Le mythe de Prométhée et d'Épiméthée, les deux fils du Titan Japet, annonce déjà le pessimisme devant l'inconséquence du caractère humain qui caractérisera les philosophes et les poètes qui lui succéderont. Alors que Prométhée dérobe à Zeus le feu sacré – c'est-à-dire le bien, la connaissance – pour l'offrir aux hommes, Épiméthée, victime d'une machination de Zeus, épouse Pandore, une femme pétrie dans l'argile par Héphaistos, d'une beauté et d'une grâce inouïes, mais destinée à faire le malheur des hommes. Car Zeus est aussi puissant que jaloux : « Mais le brave fils de Japet sut le tromper et déroba, au creux d'une férule, l'éclatante lueur du feu infatigable ; et Zeus, qui gronde dans les nues, fut mordu profondément au cœur et s'irrita en son âme, quand il vit briller au milieu des hommes l'éclatante lueur du feu. Aussitôt, en place du feu, il créa un mal, destiné aux humains. » Ce thème cher à Hésiode d'un âge d'or révolu et d'une humanité vouée au malheur se retrouvera dans presque tous les grands mythes, textes fondateurs et philosophiques, de la Bible aux Confessions de Jean-Jacques Rousseau (1782-1789).
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Écrit par
- Florence BRAUNSTEIN : professeur en classes préparatoires économiques et scientifiques
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