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THÉOLOGIENS ET MYSTIQUES AU MOYEN ÂGE. LA POÉTIQUE DE DIEU, Ve-XVe SIÈCLES, Alain Michel Fiche de lecture

L'histoire de la poétique chrétienne

L'histoire de la poétique chrétienne est faite par la succession ininterrompue des théologiens et des clercs, qui reflète elle-même la recherche de Dieu. De surcroît, cette succession est aussi étendue à tous les penseurs de l'Antiquité païenne. L'idée du Beau et celle du Bien, qu'on rencontre sous leur plus haute expression dans les Ennéades de Plotin (iiie siècle), assurent la transition avec la conception chrétienne du Beau et du Vrai en Jésus-Christ (Erwin Panofsky, Idea. Contribution à l'histoire de l'esthétique, 1924 ; Gallimard, Paris, 1983). Les sources antiques et bibliques se retrouvent dans le Verbe de Dieu, étroitement unies par sa charité, c'est-à-dire par son amour pour l'autre. À partir de cette rencontre, la conciliation entre les sagesses antiques (gréco-romaine et juive) et chrétienne est réalisée, dans les textes écrits et dans l'art. C'est comme si toute l'Antiquité aboutissait à une somme sur l'art de magnifier Dieu. La renaissance carolingienne associe la transcendance divine à la plasticité du langage humain et, dans la poésie sacrée, favorise le symbolisme sublime. Aux viiie-ixe siècles, les hymnes amplifient l'image du triomphe de la Croix, qui s'affirme comme l'un des tout premiers insignes de royauté, vexilla regis. Aux xe-xiie siècles, l'art d'Église, qu'on appelle l'art roman, doit beaucoup à la romanité, tout en s'insérant au cœur du monde méridional et à son actualité, parfois la plus brûlante (les hérésies notamment). Alors qu'on se dirige vers la polyphonie des rythmes et des sons, le symbolisme s'épanouit dans l'art sous les formes décoratives les plus diverses. La mystique réélabore tous ces thèmes sur le registre de l'ascension la plus élevée de l'âme (saint Bernard de Clairvaux, Guillaume de Saint-Thierry). Avec l'enracinement urbain des savoirs, les victorins (Hugues, puis Richard, de Saint-Victor) ouvrent la poétique de Dieu à celle des hommes, après les chartrains qui l'avaient ouverte sur la pensée rationalisée de l'univers. Une poétique profane se développe en complémentarité de celle de Dieu (Jacques Roubaud, La Fleur inverse. Essai sur l'art formel des troubadours, Ramsay, Paris, 1986). Aux xiiie et xive siècles, la parole scolastique réussit la synthèse entre la logique et la beauté (Erwin Panofsky, Architecture gothique et pensée scolastique, trad. franç. P. Bourdieu, éd. de Minuit, Paris, 1967). Le commentaire ou le « Miroir » (Speculum), tous aussi complets que possible, prennent l'aspect achevé de la Somme (Thomas d'Aquin, 1225-1274).

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de l'Université, ancien membre de l'École française de Rome, professeur d'histoire de l'art médiéval à l'université de Bourgogne

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