THÉORIE ÉLECTRIQUE DES COMBINAISONS CHIMIQUES
L'invention par Alessandro Volta (1745-1827) de la pile électrique (1800) féconda la chimie. Humphry Davy (1778-1829) la mit à profit pour découvrir et isoler de nouveaux éléments, sodium, potassium, calcium et magnésium. Jöns Jacob Berzelius (1779-1848), professeur de chimie à l'Institut Karolinska (1807), membre de l'Académie suédoise des sciences (1808), correspondant assidu de Davy, suivit passionnément ses travaux. À l'instar de Davy, il formula une théorie électrique des combinaisons chimiques, toutefois plus détaillée et plus précise. En 1812, il la présentait dans Versuch über die Theorie der Chemischen Proportionen und über die Chemische Wirkung der Elektrizität (Essai sur la théorie des proportions chimiques et l'action chimique de l'électricité). Ce que les chimistes dénommaient jusque-là « affinité » s'en trouvait élucidé. À en croire Berzelius, elle découle des polarités électriques des particules. Les composés chimiques, assura-t-il, sont binaires. Leurs deux moitiés portent des charges électriques opposées, que l'attraction unit. Cette hypothèse dualiste sur la composition de la matière eut une influence considérable.
Fin communicateur, malgré sa situation périphérique en Suède, Berzelius utilisa avec sagacité la publication de livres pour diffuser ses idées dans toute l'Europe savante. Son hypothèse sur la constitution des composés chimiques impliquait la distinction atomes-molécules. Mais elle portait en germe un conflit : l'existence de molécules faites de paires d'atomes identiques était inexplicable. Si l'hypothèse dualiste de Berzelius rendait compte de la structure de très nombreux composés minéraux, elle se heurta à des contre-exemples en chimie organique. De plus, dans les années 1830, les chimistes organiciens, Justus von Liebig et Jean-Baptiste Dumas entre autres, parvinrent à substituer, dans des molécules organiques, l'hydrogène, tenu pour électropositif, par du chlore, électronégatif. Constat de décès pour la théorie électrochimique de Berzelius ? Certes. Néanmoins, elle eut une large postérité, tant chez des philosophes (Hegel) que parmi les chimistes. Aujourd'hui encore, les notions d'attraction et de répulsion jouent un rôle primordial dans notre compréhension des phénomènes chimiques, en ce qui concerne la structure et la réactivité des molécules.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre LASZLO : professeur honoraire à l'École polytechnique et à l'université de Liège (Belgique)
Classification