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ÉLÉMENTS THÉORIES DES

Empédocle et les pythagoriciens

Au milieu du ve siècle avant J.-C., Empédocle d'Agrigente tenta de concilier la permanence des substances avec le changement perpétuel des apparences de l'Univers. Ce qui nous apparaît comme le commencement ou la fin d'un être n'est qu'une illusion ; en réalité, il n'y a rien que mélange, réunion et combinaisons qui s'opposent à la séparation des constituants et à leur décomposition. Les éléments dont toutes choses sont composées consistent en quatre substances différentes, incréées et impérissables : la Terre, l'Eau, l'Air et le Feu. Empédocle fut le fondateur de la doctrine classique des quatre éléments, déjà entrevue par ses prédécesseurs, mais à laquelle il a donné sa formule définitive.

Les quatre éléments répondent aux apparences et aux états de la matière. La Terre est le principe et le support de l'état solide et de la sécheresse. L'Eau, obtenue soit par fusion ignée, soit par dissolution, est le principe et le support de l'état liquide et du froid. L'Air, celui de l'état volatil et gazeux. Le Feu, plus subtil, répond à la fois à la notion de fluide éthéré, support symbolique de la lumière, de la chaleur, des affinités et à la notion phénoménale du mouvement des particules des corps. Tels étaient, pour Empédocle et ses successeurs, les éléments de l'Univers. Il importe d'observer que si leurs mélanges et leurs combinaisons produisent tous les corps naturels, les éléments, dans ce système, ne sont pas susceptibles d'être transformés : ils subsistent par eux-mêmes et ne se peuvent changer les uns en les autres.

Ces notions générales prirent chez les pythagoriciens des formes plus précises. Ils ajoutèrent à ces aperçus des conceptions mathématiques et géométriques dérivées de l'unité, envisagée comme l'éternelle génératrice des nombres. D'après Philolaüs (vers 450 av. J.-C.), la Terre est constituée par le cube, le Feu par le tétraèdre, l'Air par l'octaèdre, l'Eau par l'icosaèdre. Le cinquième élément, qui comprend les astres et leur sert de lien, correspond au dodécaèdre. On trouve des traces de ce cinquième élément chez Aristote. Il est, sans doute, l'une des origines de la notion de quintessence (littéralement, la « cinquième essence ») chez les alchimistes médiévaux.

Platon répandit toutes ces idées des pythagoriciens, particulièrement dans le Timée. Il y enseigne que la « matière première », « chose qui supporte tous les corps bien qu'elle ne sorte jamais de sa propre nature et qui est le fonds commun de toutes les matières différentes, étant dépourvue de toutes les formes qu'elle doit recevoir d'ailleurs », n'est par elle-même ni Terre, ni Air, ni Feu, ni Eau, ni quelque corps qui soit né de ces éléments. Elle reçoit les formes des quatre éléments, avec lesquels Dieu compose le monde, en opérant avec le Feu, sans lequel rien de visible ne peut exister ; avec la Terre, source de toute puissance solide et tangible ; avec l'Air et l'Eau, qui relient les deux principes précédents. Ces éléments ont eux-mêmes une forme géométrique, selon laquelle ils ne peuvent s'assembler que suivant certains rapports. Platon reproduit, sur ce point, les enseignements pythagoriciens de Philolaüs. Les corpuscules du Feu sont les plus petits, les plus légers, les plus mobiles, les plus actifs ; ceux de l'Air le sont moins ; ceux de l'Eau et de la Terre sont lents et lourds.

Toutefois, Platon s'écarte d'Empédocle car il admet un changement, par condensation, de l'Eau en pierre et en terre, de l'Air enflammé en feu, du Feu éteint en air, de l'Air en eau, etc. Les quatre éléments s'engendrent, d'ailleurs, périodiquement. Aucun des corps naturels, cependant, ne peut en refléter la véritable image.[...]

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Écrit par

  • : historien des sciences et des techniques, ingénieur conseil

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