THÉOSOPHIE
La Société théosophique
Le mot « théosophie » a été emprunté, de 1875 à nos jours, par une société dont l'importance est tout à fait indéniable, mais dont la doctrine n'a que certains points communs avec ce qui précède. Il est regrettable qu'à l'heure actuelle ce mot évoque indifféremment ladite société et la théosophie du contexte abrahamique. Du moins en est-il ainsi en français ; car, en anglais, on fait plus volontiers la distinction entre theosophists et theosophers, les premiers désignant ce mouvement moderne. René Guénon a bien précisé, avec une indispensable rigueur, qu'entre « la doctrine de la Société théosophique, ou du moins ce qui lui tient lieu de doctrine, et la théosophie au sens véritable de ce mot, il n'y a absolument aucun lien de filiation, même idéale », si bien qu'on ne saurait confondre l'un et l'autre « que par mauvaise foi ou ignorance » ; il n'y a même pas de doctrine de la Société théosophique, si par doctrine on entend « quelque chose de solide et de bien défini ».
Le colonel Henry Steel Olcott (1832-1907) rencontra Helena Petrovna Blavatski (1831-1891), dite H. P. B., vers 1874. Très impressionné par cette femme, qui avait exercé au Caire diverses activités, Olcott fonda avec elle, en 1875, aux États-Unis, la Société théosophique destinée à étudier l'occultisme et l'ésotérisme, selon des approches fort diverses, particulièrement orientales. Tous deux décident très vite de répandre aux Indes l'activité de leur Société théosophique, d'autant qu'ils paraissent avoir disposé d'un certain nombre d'appuis moraux et financiers ; ils arrivent dans ce pays en 1879, y recueillent un certain succès dans les milieux anglais, font l'acquisition en 1882, à Adyar, près de Madras, d'une belle demeure, qui reste aujourd'hui encore le centre mondial de la Société. En 1887, H. P. B. quitte les Indes pour Londres, mais Olcott continue à enseigner, aux Indes, un syncrétisme fait de bouddhisme, de théosophisme, ainsi que d'éléments empruntés à d'autres traditions religieuses.
Un peu plus tard, en 1889, l'Anglaise Annie Besant (1847-1933), femme de pasteur, qui avait été gagnée au socialisme matérialiste, se convertit au théosophisme en lisant La Doctrine secrète de H. P. B. Elle fait la connaissance de l'auteur et devient rapidement un des chefs de la Société théosophique. Puis elle part pour les Indes en 1893, y répand l'enseignement de H. P. B. et d'Olcott, en développant, parallèlement, l'instruction publique dans ce pays. Annie Besant connaît là-bas un succès personnel certain, mais seulement dans les milieux anglais ou anglophiles, aidée dans son œuvre par C. W. Leadbeater, dont la pensée fantaisiste s'exprime de manière assez spéciale en ce qui concerne l'éducation des jeunes gens. Malgré cela, la Société théosophique continue son essor. En 1909, A. Besant et Leadbeater essaient de persuader un jeune hindou, Krishnamurti Jiddu , qu'il est une réincarnation de grands maîtres passés. En 1929, ce jeune homme aura fini par désavouer ses « instructeurs » et par prendre définitivement ses distances avec la Société théosophique.
Après sa conversion, Annie Besant a oublié le matérialisme, mais elle n'a pas abandonné son rêve de contribuer à l'émancipation des femmes. Invitée à Paris en 1902 dans la loge mère du Droit humain, première obédience mixte de la franc-maçonnerie fondée en 1893 par Georges Martin et Maria Deraisme, elle fonde la même année à Londres la loge numéro 6 Human Duty, origine de la fédération britannique du Droit humain. Une loge unie des Théosophes est fondée en 1909, entreprise sérieuse, vouée à l'étude ainsi qu'à la propagation d'une théosophie authentique. Cela n'empêche pas[...]
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Écrit par
- Antoine FAIVRE : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section), professeur à l'université de Bordeaux-III
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Médias
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