THERMODYNAMIQUE Processus irréversibles linéaires
Autres couplages associés à un gradient thermique
La thermodynamique classique, en dehors de la géniale intuition de lord Kelvin, a toujours eu les plus grandes difficultés à dominer les problèmes posés par les systèmes où la température n'est pas uniforme. Dans le cadre de la thermodynamique contemporaine, nous allons constater, sur les exemples qui suivent, combien il paraît naturel de supputer l'existence de couplages entre flux et forces physiquement différents, mais de même caractère tensoriel, lorsque des gradients thermiques sont présents.
Thermodiffusion
Ce phénomène, découvert par K. Ludwig il y a plus d'un siècle, a été par la suite analysé plus complètement par C. Soret, peu après que L. Dufour eut découvert le phénomène inverse qui porte son nom.
La thermodiffusion (ou effet Soret dans le cas des liquides) est en général observée sur des montages où la couche strictement horizontale de mélange fluide est soumise à un gradient de température ascendant, de façon à éliminer toute convection parasite.
Dans un mélange binaire, une solution par exemple, le gradient thermique une fois établi, la diffusion provoquant la séparation des constituants suivant la verticale obéit à la relation :
où Jr1 est le courant du constituant dissous d'indice 1 par rapport au mouvement du solvant d'indice 2 (Jr1, r signifiant relatif), ∇μc1 = (∂μ1/∂C1) ∇C1 est le gradient du potentiel chimique de 1, non seulement à température T mais aussi à pression p constantes, avec ∇C1 gradient de concentration de 1, et Lik les coefficients phénoménologiques. Les expérimentateurs écrivent, par extension de la loi de Fick (D : coefficient de diffusion isotherme ; DT : coefficient de thermodiffusion) :de sorte que l'état stationnaire de séparation maximale, atteint au terme d'une évolution de durée théoriquement infinie, est donnée par le coefficient Soret sT :où L1q est donnée par (29).Le flux thermique simultané à Jr1 :
s'interprète comme un flux d'énergie débarrassé du transport de chaleur par diffusion :et permet de donner au couplage une forme caractéristique très frappante car, à ∇T = 0 :où Q*1 est la « chaleur de transfert » du corps dissous dans le mélange étudié. Selon Onsager, Lq1 = L1q. Donc :et l'on conçoit que la mesure du coefficient Soret constitue une information précieuse pour les interactions à courte et moyenne portée entre les molécules du mélange, par l'intermédiaire de la quantité Q1*.L'effet inverse, ou effet Dufour, n'est guère observable que dans les gaz, où leur mélange provoque un effet thermique (un gradient de température, par exemple). On définit, dans ce cas, un coefficient Dufour df :
où λ est le coefficient de conductivité thermique.Différence de pression thermomoléculaire et effet thermomécanique
Supposons un gaz réparti entre deux compartiments séparés par une paroi poreuse, et présentant entre eux une différence de température ΔT. L'expérience montre qu'une différence de pression Δp se développe entre ces compartiments. C'est l'osmose thermique.
À partir d'une fonction dissipative calculée pour l'unité de surface de la membrane, il est facile d'établir les relations linéaires suivantes :
où la différence (Δμ)T du potentiel chimique entre les phases se réduit ici à vΔp ; v est le volume molaire du gaz dont le flux (courant) est J. Remarquons encore la condition de réciprocité Ljk = Lkj.À l'état stationnaire, le gaz n'est plus transporté (J = 0) et la pression thermomoléculaire Δp est donnée par :
C'est typiquement un phénomène de couplage entre un transport de matière et un transport d'énergie.
Supposons que, au lieu d'une membrane, nous interposions une série d'orifices, petits devant le libre parcours moyen des molécules du gaz.[...]
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Écrit par
- Jacques CHANU : professeur à l'université de Paris-VII, chaire de thermodynamique
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