STATISTIQUE THERMODYNAMIQUE
Théorie dynamique des phénomènes dissipatifs
Reprenons donc la question de l'existence d'une définition microscopique de l'entropie sous une forme générale. Nous avons déjà remarqué que ni la norme, ∥ρ(t)∥2, ni la définition de l'entropie SG de Gibbs ne fournissent un modèle microscopique pour l'entropie des systèmes dynamiques hors d'équilibre. Il est facile de vérifier que l'entropie ne peut pas être une fonctionnelle linéaire de l'état du système. Considérons alors des fonctionnelles quadratiques, à savoir une expression de la forme :
où M est un opérateur positif dans l'espace des états. Pour que la fonction Ω(t) décroisse de façon monotone pour t > 0, il faut que la relation :où D est un opérateur non positif, soit satisfaite. On peut montrer, en outre, que l'opérateur M est une fonction décroissante M(T) d'un opérateur T conjugué à l'opérateur de Liouville, c'est-à-dire que T et L satisfont à la relation de commutation :dans l'espace orthogonal aux états d'équilibre. Afin que cette relation soit satisfaite, il faut que le spectre du générateur L soit continu et s'étende sur tout l'axe réel, plus précisément qu'il soit un spectre homogène de Lebesgue (cf. théorie spectrale). Cette condition mathématique exprime, en réalité, l'instabilité des trajectoires, et elle est vérifiée dans le cas de certains systèmes classiques finis.Du fait que l'opérateur M est positif, on peut écrire :
et, en appliquant la transformation Λ sur les états, on induit de l'équation (4) que :Un certain nombre de conditions supplémentaires doivent être imposées à cette transformation, à savoir qu'elle préserve les propriétés de positivité et de normalisation des états statistiques et qu'elle laisse invariant l'état d'équilibre. De cette manière, l'évolution décrite par l'équation (7) est, pour t > 0, un processus de Markov, au sens des probabilités, la famille des opérateurs Vt définissant un semi-groupe markovien contractif. Il s'ensuit que des fonctionnelles concaves de ρ peuvent être choisies comme définition microscopique de l'entropie. Des modèles classiques finis ont été étudiés, et on a montré la cohérence des considérations exposées ci-dessus. On arrive ainsi à mettre en évidence le lien profond entre une description déterministe et réversible des systèmes dynamiques et la possibilité d'une description stochastique irréversible. Néanmoins, il reste à établir que le semi-groupe ainsi construit conduit à des équations régissant des processus dissipatifs tels que la diffusion.
La discussion des problèmes liés à la théorie microscopique des phénomènes dissipatifs était limitée jusqu'à maintenant à des systèmes dynamiques isolés.
Examinons maintenant le cas des systèmes ouverts, c'est-à-dire des systèmes en interaction avec un réservoir thermique (un thermostat). Leur évolution n'est pas déterminée par leur hamiltonien ni caractérisée par un groupe unitaire. D'un point de vue phénoménologique, on postule alors que l'évolution irréversible vers un état d'équilibre est décrite par un semi-groupe qui préserve au cours du temps (t > 0) l'interprétation probabiliste des états statistiques, condition permettant de déduire la forme générale de son générateur. Notons que cette approche peut être considérée comme une généralisation, certes non triviale, des travaux de Adriaan Daniël Fokker et Max Planck sur le « mouvement brownien », le mouvement désordonné des particules dans un fluide. En effet, l'étude des systèmes classiques n'est qu'une application de la théorie mathématique des processus stochastiques markoviens. En revanche, l'étude approfondie du cas quantique est relativement récente, et le calcul[...]
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Écrit par
- Alkiviadis GRECOS : docteur en sciences, maître d'enseignement
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