THERMOMÈTRES GÉOLOGIQUES ou GÉOTHERMOMÈTRES
Utilisation des états d'équilibre figés
L'hypothèse de base est la suivante : la roche était en équilibre thermodynamique à une certaine température T. À partir de cette température, le refroidissement a été suffisamment rapide pour empêcher tout réarrangement de l'édifice minéral. Par conséquent, l'étude du système figé doit fournir les paramètres physiques relatifs à l'équilibre, et en particulier la température T.
Le principal écueil est que ces paramètres sont souvent assez nombreux. La plupart des associations minérales que l'on rencontre dans les roches sont des systèmes au moins bivariants, c'est-à-dire que leur existence indique seulement un certain domaine de températures et de pressions (une certaine surface dans le plan P-T). Il existe cependant un certain nombre d'équilibres univariants, par exemple ceux qui sont liés à l'apparition ou à la disparition de certains minéraux dans le métamorphisme.
Ces réactions qui correspondent aux isogrades permettent d'établir une relation T = f (P) [une courbe dans le plan P-T] ; cependant, comme la pression n'est généralement pas déterminable indépendamment, cela ne permet pas d'en déduire la température. La pente de la tangente à la courbe d'équilibre est la relation de Clapeyron :
sa valeur dépend des variations relatives de volume ΔV et d'entropie ΔS au cours de la transformation.Deux cas limites sont intéressants pour la paléothermométrie.
Si la transformation envisagée produit un liquide ou un gaz, il y a généralement un accroissement important aussi bien du volume que de l'entropie. C'est, par exemple, le cas des réactions de déshydratation telles que :
ou de décarbonatation telles que :Alors, pour un certain domaine de pressions « moyennes » (de 1 à 7 kbar, soit de 100 à 700 MPa), variables avec la réaction considérée, la variation d'entropie l'emporte largement sur la variation de volume, et l'on a :
c'est le cas de la plupart des treize réactions définies par Bowen dans le métamorphisme des calcaires siliceux ou par Bowen et Tuttle dans le cas des systèmes hydrosilicomagnésiens. C'est également le cas des phénomènes de fusion (par exemple, ceux qui donnent naissance aux magmas granitiques), et cela d'autant plus que la phase gazeuse (H2O, par exemple) est plus importante, car, en se mélangeant au liquide formé, elle accroît d'autant l'entropie de fusion. Quelques équilibres peuvent servir ainsi de thermomètres géologiques. Néanmoins, leur utilisation suppose parfois la connaissance de paramètres supplémentaires qui ne sont généralement pas accessibles. On voit, par exemple, le changement introduit dans la courbe de fusion commençante du granite suivant que la pression d'eau est nulle (7′) ou égale à la pression totale (7).Lorsque la transformation se produit avec une variation de volume négligeable, on a encore :
Cela se produit en pratique dans deux cas importants : – Un élément se partage entre deux phases solides. La variation relative de volume est alors souvent très faible et, comme les volumes molaires des solides sont eux-mêmes faibles, on aboutit à un ΔV négligeable par rapport à ΔS. Cela est particulièrement intéressant quand l'élément en question est un élément en traces qui ne conditionne pas l'existence ou la disparition d'une phase. Alors, les bilans de matière sont très simples à écrire et l'équilibre de partage se traduit très facilement.
– Les propriétés du soluté sont suffisamment voisines de celles du solvant pour que la solution soit quasi idéale quelle que soit la concentration. C'est typiquement le cas des mélanges d'isotopes des éléments, qui, de plus, peuvent généralement être considérés aussi comme le partage d'un élément en traces, car l'un des isotopes est le plus souvent nettement[...]
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Écrit par
- Marc JAVOY : physicien adjoint à l'Institut de physique du globe de l'université de Paris-VI
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