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EBBESEN THOMAS (1954- )

Des nanotubes de carbone aux interactions lumière-matière

Chez NEC, Thomas Ebbesen fera une grande découverte : la transmission extraordinaire optique. Alors qu’il travaille sur les nanotubes de carbone et les fullerènes, il lit un article du physicien français Serge Haroche, futur médaille d’or du CNRS en 2009 et futur Prix Nobel de physique en 2012, qui traite de l’électrodynamique quantique en cavité, c’est-à-dire de l’étude, dans une boîte fermée constituée de deux miroirs métalliques qui se font face, de quelques atomes et quelques photons afin de comprendre comment la matière et la lumière interagissent en obéissant aux lois de la physique quantique pour en éclairer ainsi les fondements. Intrigué par cette discipline, il décide d’initier en 1989 des travaux qui permettront par la suite de comprendre le phénomène de transmission extraordinaire de la lumière. En manipulant des plaques métalliques percées d’un réseau régulier de petits trous de 300 nanomètres de diamètre – une taille bien inférieure à celle de la longueur d’onde de la lumière visible (400-700 nm) –, lui et ses collègues s’aperçoivent avec surprise que la lumière peut passer au travers alors qu’on supposait à l’époque qu’elle ne pouvait emprunter des ouvertures de taille inférieure à sa propre longueur d’onde (taille dite sub-longueur d’onde). Ce n’est qu’en 1998 qu’il parvient à démontrer que les plasmons de surface, résultant de l’interaction résonante entre les ondes lumineuses et les électrons libres présents à la surface du métal, se propagent, à la manière de vaguelettes à la surface de l’eau, au voisinage de ces trous de taille sub-longueur d’onde qui agissent alors comme une sorte d’entonnoir à photons. Et la quantité de lumière qui passe à travers le réseau de trous est bien plus importante que celle qui passerait à travers l’ensemble des trous isolés. L’explication de ce phénomène dit « d’exaltation » de la transmission de la lumière sera reconnue par le jury des prix Kavli (Norvège), qui attribuera à Thomas Ebbesen, en 2014, celui de la catégorie nanosciences (les deux autres catégories récompensées étant l’astrophysique et les neurosciences).

En 1996, Thomas Ebbesen est invité par Jean-Marie Lehn (Prix Nobel de chimie 1987) à rejoindre, à l’université de Strasbourg, l’Institut de science et d'ingénierie supramoléculaires (ISIS) en tant que professeur. Il en assure la direction de 2005 à 2012, succédant à Jean-Marie Lehn. Depuis 2012, il est directeur de l’Institut d’études avancées de l’université de Strasbourg (USIAS) et poursuit ses recherches fondamentales sur les interactions lumière-matière à l’ISIS en tant que directeur du laboratoire de nanostructures.

À Strasbourg, avec ses équipes, il montre qu’il est possible de changer les propriétés de la matière, comme la conductivité d’une molécule, par exemple, grâce aux plasmons résonants à la surface de réseaux de nanotrous. Puis il démontre que les fluctuations du champ électromagnétique (présent naturellement partout dans l’Univers), piégées entre deux miroirs métalliques, peuvent entrer en résonance avec des molécules introduites entre ces mêmes miroirs. Cette interaction provoque une décélération ou une accélération de la vitesse des réactions chimiques entre les molécules et permet même de favoriser sélectivement la formation d’un produit donné par rapport à un autre. Ces résultats surprenants ont fait naître un nouveau domaine appelé « chimie polaritonique » qui suscite un intérêt grandissant dans le monde de la recherche.

Outre le prix Kavli (2014) et la médaille d’or du CNRS (2019), Thomas Ebbesen a reçu d’autres récompenses dont deux décernées par la Société européenne de physique : le prix Europhysics Agilent en 2001 pour ses travaux sur les nanotubes de carbone – il[...]

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Écrit par

  • : doctorant à l'Institut de science et d'ingénierie supramoléculaires de l'université de Strasbourg

Classification

Média

Thomas Ebbesen - crédits : Caroline Schneider /ISIS /CNRS

Thomas Ebbesen