JOLLY THOMAS (1982- )
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Un spectacle total ?
Avec une énergie et une flamboyante audace, Thomas Jolly va renouveler l’exercice de la cérémonie d’ouverture des jeux Olympiques, l’ouvrant à la culture et aux arts vivants, jouant sur la multiplication des regards. Pour la première fois organisée hors d’un stade, elle a réuni 326 000 spectateurs sur les quais de Seine, et plus de 24,4 millions de téléspectateurs ont suivi la retransmission en France. Cet événement est un rare moment de ralliement d’un public émerveillé par le concert live de chanteurs, du classique à la variété, sur fond de bandes-son musicales et de films projetés sur les murs parisiens, avec force jets de laser fluo et fumigènes, jusqu’au rose « flashy » projetés sur les façades historiques, tout cela sous une pluie battante. Et sur le pont des Arts, la chanteuse franco-malienne Aya Nakamura, en duo avec la Garde républicaine, crée la surprise. Au fil du parcours sur la Seine, Thomas Jolly a su multiplier les points de vue tournoyants sur les lieux symboliques, de Notre-Dame à la Concorde et jusqu’au Trocadéro. L’aventure des Jeux se boucle au Stade de France de Saint-Denis pour les cérémonies de clôture.
Entre théâtre, opéra, comédie musicale, cinéma et série télévisée s’imposent en chœur la poésie, la danse et la musique. À l’image des grandes cérémonies baroques où chacun se fait spectateur et acteur, la fête se veut un moment de grâce, célébrant la reconnaissance des corps et des subjectivités et l’utopie d’une communauté respectueuse des différences. On l’a vu encore lors de la cérémonie d’ouverture des jeux Paralympiques, qui a eu lieu place de la Concorde : sur un podium cent quarante danseurs et seize performeurs en situation de handicap ont enchaîné les tableaux, un rappel de l’esthétique de Pina Bausch.
Ainsi, les cérémonies olympiques et paralympiques ont su mettre en majesté un spectacle collectif auquel ont concouru les corps des athlètes, interprètes, acteurs, performeurs, danseurs, bénévoles et spectateurs, et des scènes collectives chorégraphiées, le rappel d’une France de la pluralité. C’est bien d’un désir de renouer avec le tableau d’histoire et l’esprit de la fête civique qu’il s’agissait ici, même si, par le recours abondant et maîtrisé au grand-guignol, la parodie n’était jamais très loin du message universaliste.
La démesure, pour Thomas Jolly, est l’essence même du théâtre : les tragédies grecques étaient jouées à Athènes devant 20 000 spectateurs et constituaient déjà un théâtre politique et populaire. L’engouement collectif est la force fédératrice du spectacle vivant, le témoignage du désir de faire société ensemble. Vision d’un théâtre où l’art agrandit le cercle des sympathies, des joies et des découvertes, au-delà de soi.
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Écrit par
- Véronique HOTTE : critique de théâtre
Classification
Média
Autres références
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THÉÂTRE OCCIDENTAL - Crises et perspectives contemporaines
- Écrit par Jean CHOLLET
- 3 827 mots
- 5 médias
...Paroles gelées (2012), LaBonne Âme du Se-Tchouan de Bertolt Brecht (2013), ou encore Liliom, de Ferenc Molnàr (2014). Autre jeune metteur en scène, Thomas Jolly rejoint Shakespeare à travers une réalisation hors normes de Henri VI, trilogieprésentée pour la première fois en France dans son intégralité,...