MIDDLETON THOMAS (1570 ou 1580-1627)
Les biographes diffèrent sur la date de naissance de Thomas Middleton. On le fait naître tantôt en 1570, tantôt dix ans plus tard. Ce qui est sûr c'est qu'un Thomas Middleton fut baptisé à Londres le 18 avril 1580, et qu'il était le fils de William Middleton, maçon de son état, qui se disait gentleman et avait un blason. Thomas fut inscrit sur les registres de Queen's College (Oxford) en 1598 — on ne sait pas ce qu'il y fit — et on le retrouve à Londres, vers 1601, marié, et fréquentant les théâtres. Son nom est bientôt associé à ceux de Dekker, avec lequel il écrivit une partie de La Putain honnête (The Honest Whore), Drayton (1563-1631), Webster et Munday (1553-1633) sur les registres de Henslowe. Il faisait son apprentissage. Un peu plus tard, vers 1605, il travaille avec les grands, Chapman, Marston, Jonson et Fletcher pour les compagnies d'enfants (Children's Companies) et une de ses premières comédies, The Phoenix, fut écrite en 1603 pour les jeunes choristes de St. Paul. C'est pour eux qu'il composera plusieurs comédies entre 1604 et 1608, Michaelmas Term, Quel monde fou, mes amis (A Mad World, my Masters), Un tour pour attraper le vieux (A Trick to Catch the Old One), comédies qui sont parmi les plus enlevées de son abondante production.
Middleton, en effet, est un génie prolixe et touche-à-tout. Il écrivit plus de trente pièces, comédies londoniennes, tragédies, masques, divertissements, collabora avec nombre d'auteurs, en dernier lieu avec Rowley, qui lui donna le goût du romanesque. Il a cependant son tour d'esprit particulier, qui fait de lui un observateur des plus fins et un réaliste malicieux dans ses comédies de mœurs qui sont des documents précieux sur la société de l'époque. Middleton est avant tout un citoyen de Londres, un jacobéen sans complexe qui fait son métier de dramaturge avec ce qu'il a sous les yeux, ce qui lui tombe sous la main. Sa satire n'est pas hargneuse, ses caricatures ne sont pas répugnantes, et ses bonshommes n'ont pas la folie des grandeurs ni la hantise des fantômes. Il est aussi loin de la comédie des humeurs d'un Jonson que des nostalgies romanesques d'un Shakespeare. S'il est cynique, c'est un cynique à l'intelligence froide, qui répugne à l'emportement, et même au jugement.
Il écrivit toutefois deux tragédies qui méritent une place de choix dans la dramatologie de l'époque : L'Enfant changé (The Changeling, 1622, publié en 1653), en collaboration avec Rowley, et Les femmes se défient des femmes ou Femmes, prenez garde aux femmes (Women Beware Women, 1627, publié en 1657). La première est l'histoire d'un meurtre domestique : l'héroïne, Béatrice, fait tuer celui qu'on veut lui faire épouser par un homme qui l'aime, mais qu'elle hait, et qui, de surcroît, est un monstre, De Flores. Mais De Flores exige sa récompense : devenir l'amant de Béatrice. Tout finit bien, c'est-à-dire par le châtiment des assassins, non sans quelques très belles scènes entre les complices torturés par l'amour et le remords. La seconde est fondée sur la vie de la belle Bianca Capello qui s'enfuit avec son amant, et sera ensuite séduite par le grand-duc Francesco de Médicis, enflammé par sa rare beauté — elle avait eu l'imprudence de se mettre à la fenêtre pour regarder passer le cortège du grand-duc. La tragédie se termine par un massacre général dans la confusion d'un divertissement truqué. Peut-être est-ce là le chef-d'œuvre de Middleton.
On peut ajouter qu'il écrivit aussi un drame politique, Une partie d'échecs (A Game at Chesse, 1624), pièce anticatholique et anti-espagnole, provoquée par le mariage entre le prince Charles et une princesse espagnole. C'est une comédie fort ingénieuse, où les personnages des deux maisons sont vêtus[...]
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Écrit par
- Henri FLUCHÈRE : doyen honoraire de la faculté des lettres et sciences humaines d'Aix-en-Provence
Classification
Autres références
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ÉLISABÉTHAIN THÉÂTRE
- Écrit par Henri FLUCHÈRE
- 10 600 mots
- 2 médias
Thomas Middleton (1580-1627), Philip Massinger (1583-1639/40), George Chapman (1559 env.-1634) ont tous trois contribué au genre comique ; le premier, en vive réaction contre la comédie romanesque et sentimentale, est un réaliste sans illusion : A Trick to Catch the Old One (Un truc pour rouler...