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THURINGIENS, ALAMANS ET BAVAROIS

L'art bavarois

Il est beaucoup plus difficile de définir un art « national » des Bavarois car, à la différence des Alamans et des Thuringiens, ceux-ci ont été tributaires, en matière culturelle, des peuples avec lesquels ils étaient en contact : jusqu'au milieu du vie siècle, ce furent surtout les Alamans, les Thuringiens et les Lombards de Pannonie. Ensuite, l'influence des Avars, des Lombards de Haute-Italie et des Francs fut prépondérante.

Autant qu'on en puisse juger par l'archéologie, et bien qu'une continuité d'occupation soit attestée dans maintes localités romaines de la rive droite du Danube, comme à Regensburg, la rupture culturelle avec l'Antiquité fut beaucoup plus grande que dans le monde mérovingien occidental. L'évangélisation de la Bavière, sous l'impulsion des missions franques, entraîna dès les alentours de 600 la multiplication des monastères et des églises. Les fouilles archéologiques révèlent les plans de ces édifices de bois ou de pierre, mais il ne subsiste rien de leur décor.

À la différence de celles du monde alémanique qui leur sont contemporaines, les sépultures recèlent rarement un mobilier funéraire exceptionnel. La vaisselle de terre et de verre est en général peu représentée, exception faite de céramiques communes décorées au peigne. L'orfèvrerie suit les modes du temps. Proche de celle du monde alémanique, elle est notamment marquée au vie siècle par des influences ostrogothiques (fibules ansées dissymétriques) et franques (fibules ansées dissymétriques et aviformes). Dès la fin du vie siècle, l'empreinte des Lombards, établis en Italie depuis 568, domine, et c'est par leur intermédiaire que les styles et les techniques du monde méditerranéen se répandent en Bavière : décors animaliers de boucliers et de fourreaux de scramasaxes (longs couteaux ou sabres à un tranchant), fibules et pendentifs d'orfèvrerie rehaussés de filigranes, croix funéraires en tôle d'or estampé. L'imitation des modèles avars (boucles d'oreilles à pendant ovoïde, garnitures de ceinture à pendentifs multiples) et byzantins (boucles d'oreilles à pendants ajourés en lunule ou en corbeille, motifs décoratifs géométriques et anthropomorphes appliqués à la damasquinure) révèle au viie siècle la parfaite maîtrise des orfèvres bavarois, voire l'existence d'un véritable art national bavarois. La damasquinure sur fer (poignées et fourreaux d'armes, garnitures de baudriers, de ceinture et de chaussures) en est la meilleure expression.

Si la disparition des dépôts de mobilier funéraire dans les tombes bavaroises au cours du viiie siècle nous a privé d'une source documentaire privilégiée, les rares objets religieux conservés dans les trésors des églises et des monastères attestent que l'essor de cet art bavarois se poursuivit : en témoigne le célèbre calice du duc Tassilo (vers 777), conservé à l'abbaye bénédictine de Kremsmünster.

La visite des musées de Zurich, de Stuttgart, de Munich, de Nuremberg ou de Weimar, parmi bien d'autres musées régionaux et locaux fort riches et bien présentés, constitue la meilleure introduction à l'art des Alamans, des Thuringiens et des Bavarois, et plus généralement à celui du monde germanique au lendemain des Grandes Invasions.

— Patrick PÉRIN

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Écrit par

  • : directeur du musée des Antiquités nationales, Saint-Germain-en-Laye

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