TIKAL
Guerres et conflits
D'autres indices, provenant souvent de sites voisins, permettent de comprendre la suite des événements. Tikal semble déchirée par des conflits dynastiques et le roi suivant, un « usurpateur », revendique un lien avec la première dynastie, rompant ainsi avec l'héritage de Teotihuacán. Comme sa tombe, la sépulture 195 sous le Temple 32, a subi une inondation, la boue a exceptionnellement préservé de nombreux objets en bois, des figurines, un joug. Après sa mort, les conflits se poursuivent et une faction part fonder Dos Pilas, qui se rallie à Calakmul. La lutte entre les deux capitales continue et le nouveau dirigeant affronte Calakmul, perd et se réfugie à Palenque en 659, accueilli par le grand Pakal. En 672, il prend Dos Pilas, mais subit une autre défaite en 679.
Son fils, Jasaw Chan K'awill I, renverse la situation en remportant une victoire décisive sur Calakmul en 695. Tikal retrouve ainsi sa puissance qui se manifeste par une frénésie de constructions. Délaissant l'Acropole nord, les nouveaux dirigeants innovent. Parmi les monuments laissés par Jasaw Chan K'awill, on compte trois complexes jumeaux, un ensemble architectural spécifique à Tikal. Sur une vaste esplanade, deux pyramides à quatre escaliers occupent les côtés est et ouest. Au sud, un édifice à neuf portes évoque le monde souterrain et au nord, un enclos abrite une stèle et un autel. Outre ces ensembles, le souverain fait édifier un terrain de jeu de balle et entame la construction des Temples 2 et 1, qui abritera sa tombe. Cette sépulture (116) a livré parmi de multiples richesses : 114 perles de jade, un vase en mosaïque du même matériau et 37 os gravés dont l'un représente les divinités de l'inframonde dans un canoë. La construction du temple 1, aux neuf degrés monumentaux, est achevée par son fils, Yik'in Chan K'awiil, 27e dirigeant. Au sommet du temple, la crête faîtière représente le grand roi tandis qu'un linteau en bois, l'un de ceux pillés par Bernoulli, montre le roi victorieux. Il est entouré de motifs évoquant l'époque de grandeur des liens avec Teotihuacán. La date d'inauguration, le 14 septembre 695, correspond à la célébration du 13e katun après la mort de Spearthrower Owl, ce général mexicain fondateur de la puissance de Tikal.
Les grands travaux n'entravent pas la poursuite des guerres contre Naranjo et Dos Pilas. Yik'in Chan K'awiil remporte de nouvelles victoires sur Calakmul en 736, El Perú en 743 et Naranjo en 744. Ces victoires qui consacrent la domination de Tikal sont célébrées sur les linteaux du Temple 4, le plus imposant avec ses 65 mètres de hauteur. L'activité constructive se poursuit avec l'édification du Temple 6 ou Temple des Inscriptions, la mise en place du réseau de chaussées monumentales qui relient les différents temples et la mise en place définitive, face à l'Acropole nord, de l'acropole centrale, résidence royale aux multiples pièces.
Au dirigeant suivant, on doit deux des plus grands complexes jumeaux, les complexes Q et R (771 et 790). Mais son règne voit le regain des cités rivales et sa disparition en 794 marque le début de la décadence. Le dernier monument important de Tikal est érigé en 810, prélude à un silence de soixante ans. En 869, les dirigeants, affaiblis, érigent une nouvelle stèle, mais la dernière connue, en 889, se trouve à Jimbal, site mineur de l'orbite de Tikal. La cité a vécu et elle est peu à peu désertée. Elle ne sera plus que l'objet de pillages et d'offrandes occasionnelles. Quand le conquistadore Hernan Cortés traverse le Petén, il passe sans les voir près des prestigieuses ruines. Tikal est tombée dans l'oubli.
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Écrit par
- Éric TALADOIRE : professeur émérite des Universités
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