TITAN, Jean Paul Fiche de lecture
Publié en quatre volumes de 1800 à 1803, Titan est souvent considéré comme le chef-d'œuvre de Jean Paul (1763-1825). L'écrivain allemand, de son vrai nom Johann Paul Friedrich Richter, jouissait au moment de la publication de ce roman d'une renommée certaine : Hespérus, un ouvrage dont la structure et la thématique préfigurent Titan, mais sur un mode excessivement sentimental, connut en 1795 un succès considérable. D'autres livres, notamment le récit de La Vie de Quintus Fixlein (1796) et le roman humoristique Siebenkäs (1796-1797), avaient révélé les multiples facettes de son talent.
L'apprentissage d'Albano
Titan, qui paraît au milieu de l'époque de latence intellectuelle et politique qui sépare, en Allemagne, les débuts de la Révolution française (1789) de la fin du Saint Empire romain germanique (1806), reflète par bien des côtés les préoccupations du moment. Le roman retrace les années de jeunesse d'un aristocrate idéaliste, Albano. Si l'on excepte deux voyages en Italie, l'histoire se déroule pour l'essentiel dans la province allemande des années 1790. À l'issue de rebondissements multiples et de machinations obscures, Albano apprend qu'il est le prince héritier de Hohenfliess, l'une des multiples principautés de l'Empire allemand : « Il arriva au crépuscule sur la colline qui surplombait la ville, celle qui devait devenir l'arène et la scène de ses futures prouesses. Mais cette fois il la contempla avec d'autres yeux : il avait désormais une patrie en Allemagne – les hommes qui l'entouraient étaient les enfants de son pays. » Formé loin de l'atmosphère délétère de la cour et des intrigues courtisanes, Albano sera sans nul doute un souverain philanthropique : sa sympathie pour la Révolution française en est un témoignage éloquent. Jean Paul, cependant, ne nous montre pas le gouvernement d'Albano : le roman s'arrête au moment où celui-ci accède au trône. La fiction jean-paulienne reflète bien l'une des questions centrales qui agitent la littérature allemande autour de 1800 : par quels moyens changer la société allemande ? Comme la plupart de ses contemporains, Jean Paul opte pour une solution « réformiste » : la révolution se fera non pas par le biais de la violence plébéienne, mais par celui des Lumières patriciennes. La « révolution » sera princière. De surcroît, la priorité va à la transformation de l'individu. Celle-ci entraînera la réforme du corps social.
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Écrit par
- Christian HELMREICH : agrégé d'allemand, ancien élève de l'École normale supérieure, maître de conférences à l'université de Paris-VIII
Classification
Autres références
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JEAN PAUL, JOHANN PAUL FRIEDRICH RICHTER dit (1763-1825)
- Écrit par Bernard LORTHOLARY
- 2 408 mots
...les plus riches aussi, tout nourris par l'élaboration intellectuelle et affective d'expériences que l'auteur entend considérer comme désormais révolues. C'est d'abord le volumineux Titan (1800-1803), qui met en scène, critique et veut condamner l'individualisme exacerbé en « titanisme » génial,...