TITO JOSIP BROZ dit (1892-1980)
Le chef des Partisans et le chef de l'État yougoslave
Le 6 avril 1941, quand l'Allemagne attaque la Yougoslavie, Tito se trouve à Zagreb. Sous sa direction, le P.C.Y. envisage un soulèvement, mais ne le déclenche qu'après l'invasion de l'U.R.S.S. par l'Allemagne en juin 1941. Tito devient le chef de l'état-major des unités de Partisans (juill. 1941) et va créer une véritable armée de libération (1942) ; il sera maréchal en 1943. Passé à Belgrade en mai 1941, il prend le maquis en septembre et participe aux combats de la résistance jusqu'à la fin – il sera blessé à la bataille de la Sutjeska en 1943. Mais le P.C.Y. affirme aussi la représentativité politique du mouvement des Partisans contre le gouvernement en exil à Londres et réussira à la faire reconnaître par les Alliés – Tito est le président du comité exécutif (créé en novembre 1943) du Conseil antifasciste de libération nationale. En août 1944, il rencontre Churchill à Naples et, en septembre, Staline à Moscou pour la première fois. Les qualités de stratège militaire de Tito ont été discutées (erreurs tactiques selon Djilas par exemple), mais il a saisi l'importance qu'il y avait à prendre le maquis et à s'implanter dans les villages, il a su organiser le combat des Partisans et acquérir leur loyauté par ses qualités de dirigeant. Il a compris la possibilité de transformer la lutte de libération contre l'occupant en révolution, sans faire référence au socialisme mais en prenant position contre le pouvoir ancien, pour la justice sociale, et en affirmant le pouvoir du P.C.Y. pendant la guerre même, dans une semi-guerre civile, contre son principal opposant, les Tchetniks serbes du Draža Mihajlović, représentant du gouvernement royal, et autre force de résistance. Autre facteur important, Tito a proclamé le maintien de l'État yougoslave, alors démembré, et a fait appel à toutes les nationalités dans l'égalité et la fraternité.
Devenu, le 7 mars 1945, le chef du nouveau gouvernement de la Yougoslavie libérée, il détient ensuite jusqu'à sa mort les plus hautes fonctions dans l'État (Premier ministre puis président de la République à partir de 1953) et dans le parti (secrétaire général puis président de la Ligue des communistes), fonctions que respectivement la Constitution de 1974 et le statut du parti de 1978 lui reconnaissent officiellement à vie pour sa contribution à la révolution yougoslave. Son action après 1945 est indissociable de l'histoire de la Yougoslavie socialiste. Malgré son attachement au marxisme-léninisme, à l'U.R.S.S. et à Staline, Tito a refusé de s'incliner en 1948 devant Staline et le Kominform qui critiquaient les orientations données par les dirigeants du P.C.Y. au régime yougoslave, grâce au soutien des autres dirigeants, fidèles compagnons d'avant guerre et grâce à son prestige de chef des Partisans ; il a créé ainsi la première brèche dans le monolithisme du mouvement communiste. Il a affirmé le droit de l'État socialiste à la souveraineté et à une voie indépendante dans l'édification du socialisme. Pour la Yougoslavie, il a développé l' autogestion, théorisée par le dirigeant d'origine slovène Edvard Kardelj. Si la lutte contre les opposants a été très dure dans l'immédiat après-guerre, y compris contre les partisans de l'U.R.S.S. en 1948, Tito a su laisser se développer, par la suite, un mode de vie qui convenait à la population, mêlant traditions de la société paysanne, caractéristiques de la « société de consommation », influences culturelles occidentales. Il avait pour une grande partie de la population un rôle « charismatique » ; lors de sa mort, nombre de Yougoslaves ont pu ressentir un peu la perte d'un père. Sur le plan politique, il était l'arbitre entre les intérêts divergents des républiques et nationalités. En politique étrangère, il a affirmé l'indépendance[...]
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Écrit par
- Marie-Paule CANAPA : chargé de recherche au C.N.R.S., Centre d'études et de recherches internationales (C.E.R.I.)
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