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HAYNES TODD (1961- )

Cinéaste, scénariste et producteur américain, Todd Haynes est né le 2 janvier 1961 à Los Angeles. Très tôt, il s’intéresse au cinéma et réalise son premier court-métrage, The Suicide, en 1978. Il obtient une licence en arts et sémiotique en 1985 à la Brown University (Rhodes Island), et réalise Assassins: A Film Concerning Rimbaud, un court-métrage outré sur les relations amoureuses entre Rimbaud et Verlaine. La même année, il s’installe à New York et intègre les milieux du cinéma indépendant. Avec Barry Ellsworth et Christine Vachon, il fonde Apparatus Production, une société destinée à produire des œuvres à faible budget. Todd Haynes est remarqué avec son moyen-métrage Superstar: The Karen Carpenter Story (1987), un extravagant biopic qui évoque la vie d’une chanteuse morte d’anorexie mentale à l’âge de trente-deux ans. Au lieu d’acteurs, le cinéaste recourt à des poupées Barbie animées pour évoquer des épisodes de son existence.

Son premier long-métrage, Poison (1991), évoque de manière stylisée le malaise des homosexuels et des « gens différents » dans l’Amérique d’après-guerre. Le film se nourrit tout aussi bien de références puisées chez Jean Genet (notamment Notre-Dame-des-Fleurs, Miracle de la rose et Journal du voleur) que de clichés détournés du cinéma de genre. Composé de trois courts-métrages qui se court-circuitent et réunissant trois destins farouchement irréductibles à la société dans laquelle ils s’inscrivent, ce film mêle la reconstitution fassbindérienne du film gay (Homo), celle du film d’épouvante en noir et blanc (Horror) et le pseudo-documentaire pris sur le vif (Hero). Ce long-métrage constitue à la fois le traité poétique de Todd Haynes et une œuvre isolée, dans la mesure où l’auteur prendra par la suite plus de distance avec une approche aussi frontale de l’homosexualité. En 1992, la critique américaine B. Ruby Rich forgera, dans un article paru dans la revue Sight & Sound,l’expression « New Queer Cinema » pour qualifier les travaux de Todd Haynes, de Gus van Sant et d’autres cinéastes du tournant des années 1980-1990. Les films de ces réalisateurs ont dépassé le stade de l’œuvre militante, tout en mettant l’accent sur la présence incontournable des homosexuels dans tous les milieux sociaux.

Un double langage

<em>Carol</em>, Todd Haynes - crédits : The Weinstein Company/Film4/ Photoshot/ Aurimages

Carol, Todd Haynes

La filmographie de Haynes se clive dès cette époque entre la peinture de gens ordinaires victimes de discriminations et de mal-être divers (Safe, 1995 ; Loin du paradis, 2002 ; Carol, 2015) et la volonté de retravailler ces enjeux à l’aune des fantasmes suscités par les stars de la pop culture (Velvet Goldmine, 1998 ; I’m Not There, 2007). Les films de Todd Haynes s’ancrent dans le passé proche de l’Amérique, des années 1930 (MildredPierce, 2011) à la fin des années 1980 (Safe), avec une escale britannique (Velvet Goldmine, qui s’attache au glam-rock des années 1970). Aucun de ses longs-métrages ne se situe à l’époque de son tournage.

En 2002, Loin du paradis permet au cinéaste d’accéder à la notoriété tout en exprimant, d’une manière qu’on pourrait dire classique, ses préoccupations. Grand admirateur de Rainer Werner Fassbinder et de Douglas Sirk, il élabore un véritable « thriller social ». Se déroulant en 1957, Loin du paradis reprend pour la modifier la trame du film de Sirk Tout ce que le ciel permet (1955), dans lequel une jeune veuve issue de la bourgeoisie devient amoureuse de son jardinier. Todd Haynes amplifie cette apparente mésalliance. Cette fois, le mari de Cathy (Julianne Moore, actrice fétiche de Haynes avec Cate Blanchett) est homosexuel et le jardinier est un Noir. L’auteur transforme son film en véritable étouffoir, un malaise durable travaille le sous-texte.

Julianne Moore était déjà l’héroïne du deuxième long-métrage de Haynes, Safe, où elle interprétait le rôle d’une bourgeoise aisée de Los[...]

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<em>Carol</em>, Todd Haynes - crédits : The Weinstein Company/Film4/ Photoshot/ Aurimages

Carol, Todd Haynes

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