TOKUGAWA YOSHIMUNE (1684-1751)
Homme d'État japonais, huitième shōgun de la dynastie des Tokugawa. Né fils bâtard du daimyō de Wakayama, appartenant à l'une des branches cadettes des Tokugawa, c'est inopinément que Tokugawa Yoshimune hérita du fief de son père, après la mort de ses frères aînés ; et c'est grâce à un concours de circonstances qu'il fut appelé à succéder, en 1716, au shōgun Ietsugu, mort en bas âge. Il jouissait alors déjà de la réputation d'un seigneur sage et courageux. Arrière-petit-fils de Tokugawa Ieyasu par son père, il entendit prendre effectivement le pouvoir lui-même. Il rompit avec la coutume instaurée par Tsunayoshi de gouverner par l'intermédiaire des officiers de l'entourage immédiat du shōgun, en rétablissant l'autorité des conseils et des services du bakufu : il y fit entrer des daimyō ou des officiers de bas rang, remarqués pour leur valeur personnelle. Il consolida par ailleurs les assises de sa dynastie, en créant deux nouvelles branches latérales Tokugawa, celles de Tayasu et de Hitotsubashi (son fils allait en créer une troisième, celle de Shimizu : il y eut donc, au milieu du xviiie siècle, six familles cadettes officielles chez les Tokugawa). Mais, de telles réformes institutionnelles ne suffisaient pas pour faire face au déclin économique. Au début de son gouvernement, Yoshimune continua la politique d'Arai Hakuseki, notamment dans le domaine monétaire et en matière de restriction du commerce extérieur. Cependant, il s'attaqua également à des problèmes plus fondamentaux de la vie économique. À partir de 1721, il fit procéder au dénombrement périodique de la population roturière. Il fit exploiter de nouvelles rizières en encourageant les défrichements et l'irrigation. Il fit réviser les registres des redevances. Il s'intéressa lui-même au problème de la régulation du prix du riz. Il tenta de systématiser les organisations corporatives. Très ouvert au progrès scientifique et technique, il autorisa la lecture et la traduction des ouvrages hollandais : un fonds néerlandais fut constitué dans la bibliothèque shōgunale ; un observatoire fut installé à Edo ; du gouvernement de Yoshimune date le développement des « études hollandaises » qui permirent une approche de la modernisation, avant l'ouverture de 1859. Néanmoins, tous ces efforts ne suffisaient pas à enrayer la crise économique qui s'aggravait. Après la famine très sévère de l'hiver 1732-1733, la population japonaise paraît avoir stagné numériquement. Yoshimune lui-même dut avoir recours à des mesures exécrables, comme la remise forcée des dettes en faveur des officiers besogneux et au détriment des marchands créanciers. La pénurie monétaire provoquait un déséquilibre, les finances étant concentrées entre les mains d'un petit nombre de grands marchands. En 1736, la réforme monétaire d'Arai Hakuseki fut abrogée : les pièces d'or et d'argent furent de nouveau avilies, à des taux comparables à ceux de 1695 ; plus tard, des pièces en fer et en laiton furent émises pour pallier le manque de cuivre. D'une part, les entrées des redevances au bakufu augmentaient, d'autre part la population paysanne souffrait des exactions. Les corporations contribuèrent à l'amélioration de la circulation commerciale, mais elles renforcèrent leurs privilèges de monopole. Yoshimune démissionna en 1745, en faveur de son fils Ieshige, satisfait d'avoir stabilisé son pouvoir, mais conscient de l'inefficacité, sur bien des points, de sa politique pourtant énergique et clairvoyante.
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Écrit par
- Paul AKAMATSU : directeur de recherche au CNRS
Classification
Autres références
-
TOKUGAWA LES (1603-1868) - (repères chronologiques)
- Écrit par Olivier COMPAGNON
- 296 mots