TŌKYŌ (JEUX OLYMPIQUES DE) [1964] Contexte, organisation, bilan
Après l'Océanie en 1956, les Jeux s'ouvrent encore à un nouveau continent : l'Asie. Le 26 mai 1959, lors de sa cinquante-cinquième session de Munich, le C.I.O. désigne en effet T̄okȳo ville d'accueil des XVes jeux Olympiques d'été, au premier tour de scrutin, par trente-quatre voix, contre dix à Detroit, neuf à Vienne et cinq à Bruxelles. La plus grande métropole de la planète (dix millions d'habitants à l'époque) met tout en œuvre pour que, moins de vingt ans après la capitulation militaire, le Japon prouve au monde qu'il peut de nouveau se voir considéré comme une grande puissance, un acteur de la modernité fondant son développement sur la créativité. Le Japon investit 990 milliards de yens (2,750 milliards de dollars) pour les Jeux. Le stade olympique, situé dans le parc Meiji, inauguré en 1958, est agrandi : sa capacité est portée à quatre-vingt-cinq mille places. Doté d'une piste en cendrée de huit couloirs, il est le théâtre des cérémonies d'ouverture et de clôture, accueille les compétitions d'athlétisme, certaines épreuves équestres et la finale du tournoi de football. L'architecte Kenz̄o Tange conçoit le centre sportif Yoyogi. Celui-ci est composé de deux bâtiments principaux : la plus grande piscine couverte du monde peut accueillir quinze mille spectateurs, qui vibrent pour les compétitions de natation ; dans une enceinte plus petite se déroule le tournoi de basket-ball. Kisaburo Ito conçoit le vélodrome d'Hachīoji, où quatre mille spectateurs peuvent voir les cyclistes s'affronter sur une piste de 400 mètres en béton.
Le parc olympique de Komazawa est édifié selon les plans de Yoshinobu Ashihara. C'est là que se déroulent les compétitions de hockey sur gazon, de volley-ball et de gymnastique. Le palais des glaces de K̄orakuen (cinq mille places) voit s'affronter les boxeurs. Le Nippon Budokan, une salle de quinze mille places, est spécialement édifié pour le judo. Le bassin d'aviron de Toda, construit près de la rivière Arakawa pour les Jeux annulés de 1940, est élargi, modernisé et peut recevoir huit mille spectateurs, alors que les compétitions de canoë-kayak ont lieu sur le lac artificiel Sagami. Le champ de tir du parc Nezu, à ̄Osaka, est rénové avec l'aide des forces armées. La baie de Sagami, en face de l'île d'Enoshima, sert de cadre aux compétitions de voile. Le village olympique est construit près du centre sportif Yoyogi, à Washington Heights, sur des terrains restitués par l'armée américaine : quatorze immeubles de quatre étages et deux cent vingt-cinq pavillons en bois peuvent héberger sept mille personnes.
À T̄okȳo, les Jeux entrent dans l'ère de l'électronique : pour la première fois, le chronométrage des épreuves au centième de seconde près est la norme pour les compétitions (néanmoins, les résultats officiels ne prennent en compte que les dixièmes de seconde) ; la firme Seiko équipe le bassin de natation de plaques électroniques sensibles au toucher des concurrents, et le temps mesuré ainsi automatiquement prévaut désormais sur le jugement humain, ce qui doit permettre d'éviter une décision contestable comme ce fut le cas lors du 100 mètres masculin aux Jeux de Rome en 1960. Tout est mis en œuvre pour faciliter les communications : plus de neuf cents interprètes sont engagés ; un Journal du village olympique est publié du 15 septembre au 25 octobre 1964 ; cinq cents bicyclettes sont à la libre disposition de tous pour les déplacements courts... Grâce au satellite Syncom-3, les Jeux sont retransmis en Mondovision par la télévision aux États-Unis (la chaîne N.B.C. verse 1 million de dollars pour en avoir l'exclusivité) et dans vingt-trois pays d'Europe ; par ailleurs, les téléspectateurs bénéficient d'images filmées au ralenti.[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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