FLANAGAN TOMMY (1930-2001)
Le style du pianiste américain Tommy Flanagan s'inscrit indiscutablement dans l'esthétique bop et dans la lignée des conquêtes rythmiques et harmoniques de Bud Powell. Sa manière reste cependant inimitable : un jeu sûr et précis qui sait éviter le piège des effets appuyés et du brillant facile, un lyrisme délicat, un phrasé à la fois élégant et souple. Offrant un soutien rythmique d'une grande richesse mélodique, doté d'une imagination s'adaptant à tous les tempéraments, d'une inventivité discrète, attentive et subtile, il fut l'un des accompagnateurs les plus recherchés de sa génération. La célébrité qu'il a acquise auprès d'Ella Fitzgerald ne doit cependant pas faire oublier sa participation à deux des plus importants albums de l'histoire du jazz : Saxophone Colossus, de Sonny Rollins, et Giant Steps, de John Coltrane.
Thomas Lee Flanagan naît le 16 mars 1930 à Detroit, dans le Michigan. Il commence à étudier la clarinette à six ans et le piano à onze ans, mais il s'initie aussi à d'autres instruments : le saxophone, la contrebasse, le vibraphone. Il commence très tôt à travailler dans sa ville natale, où il se fait remarquer, à partir de 1945, comme pianiste auprès des frères Jones – le pianiste Hank Jones, le batteur Elvin Jones, le trompettiste, bugliste et tromboniste Thad Jones –, du vibraphoniste Milt Jackson et du saxophoniste Dexter Gordon.
Tommy Flanagan est d'abord influencé par Art Tatum, Teddy Wilson, Nat „King“ Cole et Erroll Garner. Mais, fasciné par le be-bop, il décide en 1956 de s'établir à New York, où il se bâtit rapidement une réputation auprès des plus grands souffleurs du moment : Charlie Parker – il remplace à l'occasion Bud Powell au célèbre Birdland –, Coleman Hawkins, Miles Davis – il participe à l'album Collectors' Items –, Sonny Rollins – avec qui il enregistre en 1956 Saxophone Colossus, aux côtés du batteur Max Roach et du bassiste Doug Watkins –, John Coltrane – avec qui il participera en 1959 à l'aventure de Giant Steps –, Donald Byrd... En 1956, on le retrouve également au côté du contrebassiste Oscar Pettiford et il entame une longue collaboration avec le guitariste Kenny Burrell. De 1956 à 1958, il travaille avec le tromboniste Jay Jay Johnson et forme le premier de ses propres trios : son album Trio Overseas (1957), avec Elvin Jones à la batterie et Wilbur Little à la contrebasse, est un classique de cette époque.
En 1963, Flanagan accepte de remplacer Don Abney, le pianiste d'Ella Fitzgerald, qu'il avait accompagnée pour la première fois en 1956, au festival de Newport ; il sera, jusqu'en 1965, puis de 1968 à 1978, l'accompagnateur régulier de la chanteuse ; on retiendra de cette période l'album Ella at Juan-les-Pins (1964). En 1966, il est directeur musical de Tony Bennett, un artiste de variétés qui a parfois fréquenté le monde du jazz. Mais, lassé d'accompagner des chanteurs, il décide en 1978 de se produire désormais avec de petites formations : Thad Jones, Milt Jackson, Kenny Dorham, Curtis Fuller, Dizzy Reece, Elvin Jones, Max Roach, Philly Joe Jones, Lucky Thompson, Rudy Rutherford et Billy Mitchell trouveront en Tommy Flanagan un partenaire idéal. Il reforme, avec son vieux complice Hank Jones, un duo de pianos qui donne Our Delights (1978) et More Delights with Hank Jones (1978). Il manifeste toujours une prédilection pour le trio piano-batterie-contrebasse, dont témoignent les albums Eclypso (1977) et Confirmation (1977-1978), avec Elvin Jones et George Mraz, Super-Session (1980), avec Elvin Jones et Red Mitchell, Thelonica (1982), hommage à Thelonious Monk, avec Art Taylor et George Mraz, Let's Play the Music of Thad Jones (1993), avec Lewis Nash et Jesper Lundgaard. Tommy Flanagan meurt à New York le 16 novembre 2001.
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Écrit par
- Pierre BRETON : musicographe
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GIANT STEPS (J. Coltrane)
- Écrit par Pierre BRETON
- 302 mots
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