TORONTO
Du centre à la banlieue
La géographie ethnoculturelle de Toronto a beaucoup changé depuis les années 1970. Après la Seconde Guerre mondiale, les enclaves d’immigrants étaient largement concentrées dans et autour du centre-ville, dans des quartiers tels que Chinatown, Cabbagetown et Little Italy, reconnus comme des enclaves « exotiques » dans une ville dominée par les élites protestantes britanniques. Depuis les années 1970, bon nombre de ces quartiers les plus anciens de Toronto se sont embourgeoisés. Les zones industrielles en bordure du lac Ontario se sont aussi transformées en quartiers résidentiels à densité moyenne et élevée, accessibles surtout aux nantis. Les immigrants ont été relégués hors du centre-ville, certes en croissance, mais dont la population est devenue plus blanche et plus aisée. La population de la ville de Toronto, la municipalité la plus ancienne et la plus centrale de la région métropolitaine, est d'environ 2,8 millions d'habitants (2021). Tant ici que dans de nombreuses autres parties de la région métropolitaine, la polarisation des revenus crée une fracture de plus en plus profonde entre les riches et les pauvres.
Pendant ce temps, la banlieue s’est diversifiée sur les plans ethnique et social. Dans la large couronne de quartiers qui s’est développée autour du centre-ville entre les années 1950 et 1980, la seule constante est la multiplicité des ethnies et des langues, ainsi que des entreprises et des institutions créées par les nouveaux arrivants. On y compte plusieurs quartiers chinois, italiens, portugais ou philippins, avec leurs propres centres commerciaux. Néanmoins, dans la banlieue torontoise, le mélange des cultures est la norme. Dans un marché immobilier aussi volatil et coûteux que celui de Toronto, plusieurs quartiers de banlieues restent plus abordables que le centre et abritent les nouveaux arrivants qui n’ont pas encore atteint le niveau de réussite économique auquel ils aspirent. La banlieue est devenue un « nouveau » foyer de la pauvreté dans une ville de plus en plus polarisée.
Au-delà, en périphérie de la ville, dans une seconde couronne, de nouveaux quartiers plus prospères ont émergé. En termes de statut socioéconomique et de composition ethnique, ces quartiers ressemblent au centre-ville : le revenu de la plupart des ménages est assez élevé, et une grande proportion de la population est blanche et née au Canada. C’est ici que le rêve de la banlieue nord-américaine s’incarne le plus facilement.
Les nouvelles tours de bureaux et d’appartements créent à Toronto une skyline spectaculaire. À bien des égards, la ville est beaucoup plus animée qu’il y a cinquante ans. Les flux d’investissements mondiaux et l’immigration ont replacé Toronto sur la carte, et elle est devenue, au Canada, la « ville des immigrants » par excellence. Le fait que ses espaces d'habitation, de travail, d'éducation et de loisirs soient partagés quotidiennement, même si c’est presque toujours de manière inéquitable, assure que le changement est, à Toronto, la seule constante.
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Écrit par
- Brian RAY : professeur agrégé, département de géographie, environnement et géomatique, université d'Ottawa, Ontario (Canada)
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Médias
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